A. Inventions brevetables
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Le caractère technique en tant que condition à laquelle doit satisfaire l'invention a été expressément confirmé par la Conférence des États contractants pour la révision de la CBE qui s'est tenue du 20 au 29 novembre 2000.
Dans le cadre de la révision de la CBE, l'art. 52(1) CBE a été aligné sur l'art. 27(1), première phrase ADPIC, afin que le terme "technologique" soit inscrit dans la disposition fondamentale du droit européen des brevets, que le champ d'application de la CBE se trouve clairement délimité et que les dispositions juridiques mentionnent explicitement que les inventions techniques peuvent, quelle que soit leur nature, bénéficier d'une protection par brevet. Le nouveau texte de l'art. 52(1) CBE indique clairement que la protection par brevet est réservée aux créations dans le domaine de la technique (JO éd. spéc. 4/2007, 54). L'art. 52 CBE révisé est applicable aux brevets européens délivrés et aux demandes européennes en instance au 13 décembre 2007, ainsi qu'aux demandes déposées à compter de cette date.
La limitation de la protection juridique aux créations techniques fait partie de la tradition juridique européenne. Le consensus a en effet toujours été que les créations dans les domaines de la technique pouvaient bénéficier d'une protection par brevet au titre de la CBE (cf. par exemple les décisions T 22/85, JO 1990, 12 et T 154/04, JO 2008, 46). Selon les chambres de recours, l'emploi du terme "invention" à l'art. 52(1) CBE 1973, ensemble les dispositions dites "d'exclusion" de l'art. 52(2) CBE 1973 et l'art. 52(3) CBE 1973 impliquaient une exigence de caractère technique ou de technicité à laquelle une invention revendiquée doit satisfaire pour être brevetable (T 931/95, T 1173/97 et T 935/97).
Il peut donc y avoir une invention au sens de l'art. 52(1) CBE si, par exemple, l'invention produit un effet technique ou si des considérations d'ordre technique sont nécessaires pour l'exécution de l'invention. Dans les décisions T 1173/97 (JO 1999, 609) et T 935/97, la chambre a constaté que dans le cadre de l'application de la CBE, il est généralement admis que le caractère technique d'une invention est une condition essentielle de sa brevetabilité. Dans l'affaire T 931/95 (JO 2001, 441), la chambre a estimé que le caractère technique est une condition implicite de la CBE, à laquelle une invention doit satisfaire pour être une invention au sens de l'art. 52(1) CBE 1973 (voir également T 1543/06).
Dans la décision T 154/04 (JO 2008, 46), la chambre a résumé les principes majeurs à la base de la jurisprudence pertinente des chambres de recours. La chambre a constaté qu'une condition implicite d'une "invention" au sens de l'art. 52(1) CBE 1973 est qu'elle doit présenter un caractère technique (critère de "technicité"). L'art. 52(2) CBE 1973 n'exclut de la brevetabilité aucun objet ou activité possédant un caractère technique, même si cet objet ou cette activité se rapporte à des éléments énumérés dans cet article, étant donné que ces éléments sont seulement exclus "en tant que tels" (art. 52(3) CBE 1973).
Lors de l'examen de la brevetabilité d'une invention faisant l'objet d'une revendication donnée, il convient d'interpréter la revendication en vue de déterminer les caractéristiques techniques de l'invention, c.-à-d. les caractéristiques qui contribuent au caractère technique de l'invention (voir également T 931/95, JO 2001, 441, T 914/02 et T 1543/06). La chambre a observé que l'art. 52(3) CBE 1973 visait manifestement à garantir que tout ce qui constituait auparavant une invention brevetable, conformément aux critères classiques de brevetabilité, le soit encore en vertu de la CBE.
Dans la décision T 619/02 (JO 2007, 63), la chambre a constaté qu'il était établi de longue date (cf. à ce sujet T 22/85, JO 1990, 12, T 931/95, JO 2001, 441 et T 258/03, JO 2004, 575) que le caractère technique de l'invention est une condition préalable fondamentale inhérente à l'art. 52 CBE 1973 et formulée comme exigence explicite à l'art. 52(1) CBE. Ainsi, le caractère technique est une condition sine qua non pour qu'une invention puisse prétendre à une protection par brevet au titre de la CBE.
En outre, la chambre a constaté qu'une invention technique est généralement utile et pratique au sens général de ces termes, mais l'inverse n'est pas nécessairement vrai, puisque tout "art pratique" et tout objet ou activité pratique ou utile n'est pas forcément technique au sens où l'entend le droit des brevets (cf. T 388/04, JO 2007, 16). Elle a relevé que dans certains systèmes nationaux de droit des brevets, le terme "utile" représente la contrepartie de l'exigence d'application industrielle énoncée à l'art. 57 CBE 1973 (cf. note 5 de l'art. 27 (1) ADPIC) ; toutefois, cette signification particulière ne confère pas non plus nécessairement un caractère technique. Par conséquent, les considérations relatives aux aspects utiles et pratiques ne sauraient remplacer l'exigence de caractère technique inhérente à la CBE, ni servir de critères équivalents. La chambre a fait observer que même si l'application industrielle et le caractère technique d'une invention sont intimement liés (T 854/90), ces deux notions ne sont pas synonymes et constituent deux exigences distinctes et non équivalentes de la CBE 1973 (T 953/94).