2.2. Tout acte ou toute omission ayant nui au bon déroulement de la procédure orale ou ayant conduit à la retarder
Une répartition différente des frais se justifie dès lors que la procédure orale entraîne des coûts excessifs, notamment lorsque c'est l'une des parties qui en est responsable (cf. T 49/86). Le droit pour une partie de demander la tenue d'une procédure orale est un droit absolu qui ne saurait être soumis à aucune condition (T 614/89, T 26/92, T 81/92, T 408/02). Lorsqu'une partie ayant requis une procédure orale n'avance aucun nouvel argument lors de ladite procédure, cela ne constitue pas un abus de procédure, ni un motif justifiant une répartition différente des frais, conformément à la jurisprudence constante des chambres de recours (cf. T 303/86, T 305/86, T 383/87, T 125/89 et T 918/92 (différent dans T 167/84, JO 1987, 369).
Dans l'affaire T 1022/93, la procédure orale, dont le requérant avait été le seul à faire la demande, était superflue. Déjà au stade la procédure de recours écrite, il avait omis de signaler pourquoi, selon lui, les revendications de procédé modifiées devaient être considérées comme impliquant une activité inventive, et de préciser que l'exemple supplémentaire décrivait un procédé selon le jeu de revendications modifiées. Il devenait donc impossible de renvoyer l'affaire sans procédure orale, ou de traiter le fond de l'affaire au cours de la procédure orale. Pour des raisons d'équité, le requérant a donc été obligé, en application de l'art. 104(1) CBE 1973, de rembourser à l'intimé les coûts occasionnés du fait de la participation à la procédure orale devant la chambre.
Dans l'affaire T 905/91, l'intimé avait demandé une autre répartition des frais de procédure au motif que le requérant s'était présenté à la procédure orale sans avoir préparé de requêtes subsidiaires et que de ce fait la procédure s'était poursuivie jusque dans l'après-midi. La chambre a rejeté cette demande, car le requérant s'était efforcé de tenir compte des objections émises par la chambre et avait donc produit de nouvelles pièces, et aussi parce qu'elle a estimé que la procédure orale a justement pour but de clarifier complètement la situation grâce à l'échange direct d'arguments, puis, au vu des résultats de ces discussions, de reformuler le cas échéant la demande de brevet. La durée de la procédure orale varie selon le cas. En tout état de cause, il n'est pas rare qu'elle se poursuive dans l'après-midi et les parties doivent s'accommoder de cette situation.
Dans l'affaire T 210/98, l'intimé a demandé une répartition des frais au motif que le requérant avait retiré trois requêtes subsidiaires au début de la procédure orale dont la préparation avait pris beaucoup de temps. La chambre a rejeté la requête et considéré qu'il est normal que les parties se préparent minutieusement pour les procédures orales. Un changement d'avis est une des situations auxquelles un mandataire agréé peut être confronté pendant une procédure orale. Car il n'est pas exceptionnel que des requêtes soient modifiées ou retirées à la suite des discussions qui se déroulent au cours d'une procédure orale, on ne peut considérer que le retrait des requêtes au début de la procédure orale, apparemment en réaction à des arguments convaincants présentés par écrit, constitue un abus de procédure.
Dans l'affaire T 461/88 (JO 1993, 295), la chambre a déclaré que le fait que le requérant ait insisté pour que des témoins soient entendus était clairement compatible avec le principe d'une défense efficace de ses droits, car une telle audition était peut-être le seul moyen de prouver que l'utilisation antérieure avait rendu l'invention accessible au public. La chambre a rejeté la demande de répartition des frais.
Dans l'affaire T 668/03, le requérant a demandé une répartition des frais au motif qu'une procédure orale avait dû se tenir une deuxième fois. En réalité, la première procédure avait dû être ajournée car le requérant y avait mis en doute l'identité de l'un des opposants. La chambre a fait observer que l'intimé était effectivement tenu d'indiquer clairement tout au long de la procédure qui faisait partie du groupe des co-opposants. Cependant, si le requérant avait soulevé la question avant la première procédure orale, elle aurait pu être réglée par écrit et, partant, le coût d'une nouvelle procédure orale aurait pu être évité. La chambre a donc considéré qu'il n'y avait aucune raison d'ordonner, dans un souci d'équité, une répartition différente des frais (cf. aussi T 1404/10).
Dans l'affaire T 490/13, selon la chambre, il était évident que la requérante (titulaire du brevet) avait manqué à son devoir de diligence durant la procédure d'opposition, étant donné qu'elle aurait dû prévoir à temps une position de repli en réponse aux objections des intimées confirmées par l'invitation à la procédure orale de la division d'opposition, même si lesdites objections lui semblaient infondées. Cette attitude a entraîné son recours et la tenue d'une procédure orale devant la chambre de recours et un renvoi devant la première instance pour apprécier des revendications qui auraient déjà pu être évaluées par la division d'opposition. Dans le cas d'espèce, la responsabilité du renvoi incombait à la requérante et la chambre a décidé une répartition des frais différente (art. 104(1) CBE), à savoir que les coûts afférents à la procédure orale supportés par les intimées devant la chambre de recours devaient être à la charge de la requérante.
Dans l'affaire T 2313/15, l'intimé (opposant) avait demandé qu'il soit procédé à une répartition nouvelle des frais en cas de renvoi de l'affaire à l'instance du premier degré. La chambre a décidé de renvoyer l'affaire, mais n'a pas arrêté de répartition différente des frais au titre de l'art. 104(1) CBE. La chambre a noté que, lors de la procédure devant la division d'opposition, le titulaire du brevet avait traité dans sa réponse à l'acte d'opposition toutes les objections soulevées par l'opposant. À cette fin, le titulaire du brevet avait fait le choix de présenter uniquement des arguments, mais pas de requête subsidiaire ni de requête en procédure orale. Une telle approche constitue un moyen de défense légitime contre une opposition, bien que le titulaire du brevet coure alors un risque calculé de subir une décision défavorable immédiate. Le titulaire du brevet n'est ainsi pas spécifiquement tenu de demander une procédure orale devant la division d'opposition. La chambre n'a pas non plus jugé équitable d'imputer au titulaire du brevet le fait que la division d'opposition ait choisi de trancher l'affaire sur la base d'une seule des différentes questions soulevées, sans émettre de citation à une procédure orale (ainsi qu'elle était en droit de faire). Enfin, le fait qu'au stade du recours, le requérant ait fait porter ses arguments uniquement sur la nouveauté par rapport au document D2, c'est-à-dire sur le seul motif de la révocation, n'était aucunement répréhensible, puisque c'était là sa seule obligation.
Dans l'affaire T 2061/19, la chambre a estimé que les parties n'étaient nullement tenues sur le plan procédural de répondre, et encore moins dans un certain délai, à une notification émise conformément à l'art. 15(1) RPCR 2020, même si l'opinion provisoire formulée leur était défavorable. L'absence de réaction à une telle opinion défavorable de la chambre, provisoire et non contraignante (art. 17(2) RPCR 2020), ne saurait constituer en soi une faute commise par négligence ou dans l'intention de nuire qui représenterait automatiquement un abus de procédure au sens de l'art. 16(1)e) RPCR 2020.
- T 967/18
Catchword:
Where opposition proceedings have been interrupted under Rule 142(1)(b) EPC, acts done by the parties or the competent body of the EPO during the period of interruption are considered invalid. An appeal against a decision taken during the interruption is inadmissible, because it has no valid subject eligible for a judicial review. The RPBA also apply to requests for apportionment of costs under Article 104(1) EPC. A negligent behaviour may also justify apportionment of costs. However, the negligence must be serious enough to be considered equivalent to wilful misconduct.
- Compilation 2023 “Abstracts of decisions”