6. Les non-inventions visées à l'article 52(2) et (3) CBE
Cette partie a été mise à jour pour refléter la jurisprudence et les changements législatifs jusqu'au 31 décembre 2023. Pour la version précédente de cette partie, veuillez vous référer à "La Jurisprudence des chambres de recours", 10e édition (PDF). |
Des éléments relatifs à des créations esthétiques auront généralement des aspects techniques, par exemple un "substrat" tel qu'une toile ou un tissu, et des aspects esthétiques, dont l'appréciation est essentiellement subjective, par exemple la forme de l'image sur la toile ou le motif sur le tissu. Si une telle création esthétique comporte des aspects techniques, il ne s'agit pas d'une création esthétique "en tant que telle" et elle n'est pas exclue de la brevetabilité. L'effet esthétique proprement dit n'est pas brevetable et ne peut faire l'objet ni d'une revendication de produit ni d'une revendication de procédé. Néanmoins, si un effet esthétique est obtenu par une structure ou par un autre moyen technique, bien que l'effet esthétique lui-même ne présente pas de caractère technique, les moyens de l'obtenir peuvent présenter un tel caractère (Directives G‑II, 3.4 – version de mars 2024).
Dans l'affaire T 686/90, la chambre a été appelée à décider si la caractéristique "œuvre d'art à la façon d'un vitrail" devait être exclue de la brevetabilité au titre de l'art. 52(2)b) CBE 1973. Selon la chambre, les indications fonctionnelles faisant référence à des créations esthétiques générales ne définissent pas une création esthétique en tant que telle, tout au moins dans la mesure où elles précisent de manière suffisante les caractéristiques techniques de l'objet revendiqué. La revendication ayant suffisamment défini un objet technique en lui attribuant comme finalité une création esthétique de forme non précisée, ainsi qu'en indiquant d'autres caractéristiques de cet objet, il ne s'agissait pas d'une création esthétique en tant que telle. C'est pourquoi en vertu de l'art. 52(3) CBE 1973, la revendication n'appelait aucune objection au regard de l'art. 52(2)b) CBE 1973.
Dans l'affaire T 119/88 (JO 1990, 395), la demande avait pour objet une enveloppe de protection pour disque souple constituée par une feuille en plastique présentant vers l'extérieur une face colorée d'une intensité lumineuse minimum donnée. La chambre a tout d'abord constaté que, en soi, le fait d'avoir une couleur particulière n'était pas une caractéristique technique de l'objet ni du dispositif qui en était totalement ou partiellement recouvert ; elle a admis toutefois que cela n'était pas forcément vrai dans toutes les circonstances. En elle-même, une telle caractéristique ne semble pas comporter un quelconque aspect technique. Toutefois, pour savoir si cette caractéristique est ou non une caractéristique technique, on peut examiner l'effet obtenu lorsqu'elle est ajoutée à un objet qui en était dépourvu auparavant (voir par ex. T 336/14). Pour déterminer si l'objet d'une revendication est exclu de la brevetabilité au regard de l'art. 52(2) et (3) CBE 1973, c'est-à-dire si cet objet est technique ou non, il faut étudier la revendication en question dans sa globalité. Cette conclusion est en accord avec celles des décisions T 38/86 et T 65/86, où l'art. 52(3) CBE 1973 est interprété comme signifiant que l'objet d'une revendication n'est pas exclu de la brevetabilité au regard de l'art. 52(2)c) CBE 1973 si ledit objet constitue un quelconque apport technique dans un domaine brevetable. Dans ces décisions, cette interprétation concernait uniquement l'art. 52(2)c) CBE 1973. Cependant, si elle vaut pour l'art. 52(2)c) CBE 1973, elle vaut également pour toutes les lettres de l'art. 52(2) CBE 1973 étant donné que l'art. 52(3) CBE 1973 fait référence à tous les points énumérés à l'art. 52(2) CBE 1973. La chambre estime donc qu'il faut examiner si les effets dus à la seule caractéristique de la couleur particulière peuvent faire de celle-ci une caractéristique n'excluant pas de la brevetabilité l'objet ou le dispositif connu présentant cette couleur. La chambre a conclu que la prétendue résistance aux empreintes était en fait purement esthétique et ne contribuait pas à conférer un caractère technique à l'invention concernée (art. 52(2)b) CBE 1973) ; elle a estimé que le fait de pouvoir classifier facilement par couleur des enveloppes de protection ne constituait pas un avantage technique mais relevait plutôt de la présentation d'informations et qu'en tant que telle, celle-ci était exclue de la brevetabilité sur le fondement de l'art. 52(2)d) et (3) CBE 1973 (voir aussi T 962/91).
Pour plus d'informations sur l'analyse relative à l'activité inventive en rapport avec des caractéristiques relatives à un objet exclu en vertu de l'art. 52(2) CBE, voir le chapitre I.D.9.2.2 "Objets exclus".