2. Répartition différente des frais pour des raisons d'équité – exemples de cas
Dans l'affaire T 952/00, la chambre a estimé que l'acte fautif, qu'il soit intentionnel ou simplement le résultat d'une négligence coupable, doit être apprécié par rapport à ce qu'aurait été le comportement normal d'une partie normalement diligente. Il doit également exister un lien de cause à effet pour les coûts litigieux. En l'espèce, les déclarations du titulaire du brevet au cours de la procédure se sont révélées inexactes, ce qui constituait une faute. La chambre était convaincue que, sans les déclarations erronées du titulaire du brevet, l'opposant n'aurait pas eu à exposer de frais pour réunir de nouvelles preuves. Il a donc été fait droit à la requête en répartition des frais présentée par l'opposant (requérant) en ce qui concerne les frais encourus par le requérant (opposant) pour réunir les preuves après la signification de la décision de la première instance.
Dans l'affaire T 1714/14, l'intimé (titulaire du brevet) n'avait déposé qu'une page du document P1 et non le document complet. Selon le requérant (opposant), ce comportement confirmait l'intention du titulaire du brevet de retenir des informations pertinentes pour les questions à trancher. La chambre a estimé quant à elle que, même si l'unique page du document P1 pouvait induire en erreur dans le contexte de la procédure, rien n'indiquait que les frais encourus par le requérant liés à la procédure d'opposition étaient imputables par un lien de causalité à un comportement négligent de l'intimé voire à un abus commis par lui. Ne serait-ce que pour cette raison, aucune répartition différente de ces frais ne pouvait avoir lieu. Cette affaire se différenciait par ailleurs de l'affaire T 952/00, dans laquelle des déclarations avaient été faites qui se sont révélées inexactes, ce qui constitue une faute, ainsi que de l'affaire T 273/10, où il y avait eu rétention abusive de documents.
Dans l'affaire T 269/02, l'intimé faisait valoir que le requérant avait eu largement la possibilité devant la division d'opposition, de modifier ses revendications afin de satisfaire aux conditions de l'art. 123(2) CBE 1973. Il s'en est toutefois abstenu, ce qui a entraîné la révocation du brevet au titre de l'art. 123(2) CBE 1973 et la nécessité de tenir la procédure de recours qui a porté exclusivement sur la question de la modification. La chambre a indiqué à l'encontre de ces arguments qu'en pareil cas, lorsque le brevet était révoqué au cours de la procédure d'opposition, le requérant devait avoir la possibilité d'étudier la décision de la division d'opposition, dûment fondée par écrit, afin de pouvoir décider de la formulation de requêtes appropriées pour la procédure de recours. Dans ces circonstances, la chambre n'a pas considéré que le requérant avait outrepassé ses droits légitimes ou en avait abusé de manière à faire supporter arbitrairement aux intimés des frais qui, en toute justice, devraient être remboursés. La requête en répartition des frais a donc été rejetée.
Dans l'affaire T 916/05, les circonstances ne justifiaient pas de répartition différente des frais. Selon la chambre, le fait que certains de ces arguments n'avaient pas été présentés auparavant et auraient pu l'être lors d'une procédure orale éventuelle devant la division d'opposition, n'a aucune importance et ne saurait constituer un abus de procédure. De fait, rien n'interdit à un requérant de présenter une argumentation différente lorsqu'il défend sa cause devant la chambre de recours.
Dans l'affaire T 162/04, l'intimé a demandé une répartition différente des frais au vu du temps et des efforts considérables qu'il avait dû consacrer à l'examen des nombreuses requêtes présentées par le requérant durant la procédure de recours, ce qui, selon lui, s'était avéré inutile puisque ces requêtes avaient par la suite été retirées. De l'avis de la chambre, la conduite du requérant ne constitue pas toutefois un abus de procédure. En retirant les requêtes contestées et en les remplaçant par d'autres requêtes, le requérant avait apparemment cherché à remédier aux objections soulevées, ce que l'on ne saurait en soi lui reprocher et qui devrait plutôt être considéré comme un moyen légitime de défendre sa cause. La requête en répartition des frais a donc été rejetée (cf. aussi T 967/12).
Dans l'affaire T 248/05, la chambre a estimé que l'allégation du manque de clarté de la catégorie de l'objet revendiqué et les frais supplémentaires éventuellement occasionnés par une clarification de l'objet ne justifiaient pas de faire supporter au requérant les frais encourus par l'intimé. D'une part, les éléments contestés de la revendication 1 et le caractère prétendument vague du mémoire exposant les motifs du recours n'avaient aucune incidence sur l'objet du recours en cause, lequel portait sur les conclusions de la division d'opposition au sujet d'un objet ajouté. D'autre part, à moins d'être intentionnel, le manque de clarté d'une revendication ou de moyens invoqués ne saurait nullement être considéré comme un abus de procédure.
Dans l'affaire T 854/12, la chambre a jugé qu'une répartition différente des frais est justifiée si l'ambiguïté concernant le titulaire de l'entreprise agissant prétendument comme partie a été exploitée de manière ciblée dans la procédure ou sciemment entretenue, et que des parties de la procédure doivent donc être répétées inutilement.