4. Connaissances de l'homme du métier déterminantes pour l'appréciation de la suffisance de l'exposé
Il est de jurisprudence constante que des caractéristiques qui ne sont pas mentionnées dans les pièces de la demande, mais dans un document auquel elles font référence, peuvent être incorporées dans une revendication si elles font clairement partie de l'invention pour laquelle une protection est recherchée. Toutefois, les caractéristiques essentielles d'une même structure qui ont été exposées dans le document cité doivent toutes être intégrées dans la revendication ; il n'est pas admis d'en choisir une plus particulièrement (T 6/84, JO 1985, 238, citée dans de nombreuses décisions).
Dans la décision T 288/84 (JO 1986, 128), la chambre a estimé que lorsqu'une invention concerne un perfectionnement apporté par rapport à un état de la technique déjà cité à l'origine dans la description de l'invention, une caractéristique largement décrite dans le document cité, mais qui n'est pas mentionnée spécialement dans l'exposé de l'invention est réputée suffisamment exposée lorsqu'elle apparaît dans les exemples de réalisation de l'invention, sous forme d'un mode de réalisation également mentionné dans le document cité.
L'exposé d'une invention peut également être considéré comme suffisant lorsque le fascicule et la description initiale font référence à un autre document, qui permet à l'homme du métier d'obtenir les informations requises pour reproduire l'invention, alors même que ces informations n'avaient pas été divulguées expressément dans la description (T 267/91, T 611/89). Dans la décision T 920/92, la chambre a estimé que ce principe s'applique quelle que soit la langue utilisée (ici : rédigé en japonais).
Toutefois, lorsque le document auquel il est fait référence est un document publicitaire éventuellement éphémère, le demandeur est bien inspiré d'incorporer explicitement les informations publiées, plutôt que d'y faire simplement référence (T 211/83, citée dans la décision T 276/99).
Dans la décision T 737/90, la chambre a explicitement déclaré qu'un document auquel il est fait référence ne peut être pris en considération que si le document auquel il est fait référence peut être clairement identifié et facilement accessible aux personnes auxquelles il est destiné. Cela ne peut être tranché qu'au cas par cas, en fonction des faits de la cause. Dans la ligne de la décision T 737/90, la chambre a confirmé, dans l'affaire T 429/96, qu'un document intégré par une référence dans le texte d'une demande de brevet devait être rendu accessible au public au plus tard à la date de publication, et non à la date de dépôt de la demande de brevet européen, de façon à être pris en considération aux fins de l'art. 83 CBE 1973.
Dans l'affaire T 521/10, la divulgation permettant la reproduction de l'invention s'appuyait sur le contenu de demandes de brevet (américaines) incorporées par renvoi qui ne satisfaisaient pas aux exigences énoncées dans la décision T 737/90. La chambre a estimé qu'un document n'était valablement incorporé que s'il satisfaisait aux conditions suivantes : i) une copie du document devait être à la disposition de l'Office à la date de dépôt de la demande ou antérieurement ; et ii) le document devait avoir été rendu accessible au public au plus tard à la date de publication de la demande conformément à l'art. 93 CBE. Étant donné qu'aucun des deux documents n'avait été rendu accessible au public et que la seule publication découlant des deux documents était une demande de "continuation-in-part" publiée à une date postérieure à celle de la publication de la demande de brevet européen en cause, les deux documents n'étaient pas valablement incorporés par renvoi.
Dans l'affaire T 341/04, il s'agissait de déterminer si un document cité en référence, qui a pu être identifié sans équivoque par son numéro à la date de dépôt du document contenant la référence, mais qui était lui-même "manquant" en ce sens qu'il n'était pas disponible à ladite date de dépôt, pouvait être "pris en considération" aux fins de l'art. 83 CBE 1973 sur la base des informations présentes dans un membre de la famille du document cité comme référence. La chambre a répondu par l'affirmative.