4.2.2 Témoignages et attestations écrites
La valeur probante des déclarations d'un témoin est fonction des faits de la cause (T 937/93, citée dans la décision T 190/05). La crédibilité de témoins ne peut être mise en doute du seul fait qu'ils ont des liens de parenté entre eux ou d'affaires avec l'une des parties (T 363/90). On ne saurait raisonnablement s'attendre à ce que l'allégation, reposant exclusivement sur un soupçon, selon laquelle les moyens de preuve ont été falsifiés, puisse être un motif sérieux de mettre en doute la crédibilité des moyens de preuve (voir l'affaire T 970/93 concernant des allégations de falsification des moyens de preuve). Les déclarations émanant d'employés de l'une des parties ont été considérées comme des moyens de preuve suffisants dans une série de recours, par exemple dans les affaires T 162/87 et T 627/88 ; T 124/88 ; T 482/89, JO 1992, 646 ; T 363/90 ; T 830/90, JO 1994, 713 ; T 838/92 et T 327/91 (directeur général de l'une des parties) ; T 190/05 ; J 10/04 (employé du cabinet du mandataire d'une partie).
Bien que les attestations écrites de personnes indépendantes tendent à conférer plus de poids, les déclarations des employés des parties à la procédure ne sont pas irrecevables en tant que telles. À cet égard, l'affaire T 523/14 n'était pas comparable à l'affaire T 1257/04 dans laquelle la déclaration d'un employé était l'unique moyen de preuve produit pour démontrer l'accessibilité au public d'une brochure. Dans l'affaire T 523/14, le contenu des attestations de deux employés des opposants a été considéré comme suffisamment crédible (accessibilité au public d'une lettre d'information publicitaire envoyée par e-mail) car il était corroboré sur ses principaux points par d'autres documents. Concernant la valeur de preuve de deux rapports d'expertises déposés, dont l'un d'eux était délivré par un employé de l'opposant, voir T 129/12.
La chambre peut considérer une attestation comme moyen de preuve admissible même lorsqu'elle est signée d'un cadre supérieur d'un opposant. Cette attestation est alors à apprécier conformément au principe de libre appréciation des preuves (T 64/13).
Dans l'affaire T 2057/13, l'attestation écrite relative au contenu du document de priorité P1, déposée pour la première fois par le titulaire du brevet en réponse à la notification de la chambre au sens de l'art. 15(1) RPCR 2007, n'a pas été admise dans la procédure. L'attestation avait été rédigée par l'un des inventeurs désignés dans P1 et un employé du requérant (titulaire du brevet). La chambre doit apprécier le contenu de P1 de manière impartiale du point de vue d'un homme du métier indépendant.
Dans l'affaire T 505/15, la division d'opposition a considéré que le témoin était crédible et la chambre n'avait aucune raison de s'écarter de cette appréciation. Le requérant (titulaire du brevet) essayait de jeter le doute sur la crédibilité du témoin en ce qu'il était un employé du requérant (opposant) et qu'un élément de sa rémunération consistait en une prime. La chambre a jugé que le paiement de primes n'était pas inhabituel et selon le témoin n'était plus dépendant depuis des années d'un projet lié à l'usage antérieur public allégué. Selon la chambre, les divergences relevées par le requérant (titulaire du brevet) ne remettaient pas en cause la fiabilité de l'ensemble des affirmations du témoin.
Dans l'affaire J 10/04, la section de dépôt avait mis en doute la crédibilité de déclarations faites sous la foi du serment puisque l'assistante juridique qui les avait faites n'était pas impartiale. La section de dépôt n'avait pas demandé à entendre l'auteur de cette déclaration comme témoin étant donné que l'audition du témoin n'aurait eu aucune incidence sur l'évaluation de la preuve en question. La chambre a tout d'abord considéré que les déclarations faites sous la foi du serment sont un moyen de preuve extrêmement probant, en particulier si, comme en l'espèce, leurs auteurs ont conscience que des déclarations intentionnellement erronées peuvent être pénalement sanctionnées selon le droit national applicable. De solides motifs sont nécessaires pour écarter ce type de preuve, tels un ensemble de circonstances rendant la déclaration très improbable. Si la section de dépôt avait estimé que les circonstances décrites dans la déclaration ne s'étaient très probablement pas produites, elle aurait dû entendre le témoin personnellement afin d'évaluer sa crédibilité (J 10/04 appliquée sur ce point par ex. par T 1100/07).
A rapprocher du cas particulier de l'affaire T 2338/13 dans laquelle le doute sur les liens entre l'opposant et un témoin entraîne des conséquences sur le standard de preuve applicable ; à l'inverse, la chambre dans l'affaire T 734/18 ne voit pas en l'espèce (fournisseur ayant des relations d'affaires avec le titulaire et l'opposant) de similarités avec T 2338/13 alléguée par le titulaire au soutien de sa demande de voir appliqué un niveau de preuve plus élevé en recours que devant la division d'opposition (voir le présent chapitre, III.G.4.3.2 "Usage antérieur public").