5.1.8 Modifications visant à remédier à un manque de clarté
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Les objections à l'encontre d'un manque de clarté des revendications (en l'espèce l'ambiguïté de l'expression "diamètre moyen des particules") et les requêtes en modification qui en découlent ne concernent la procédure d'opposition que dans la mesure où elles sont susceptibles d'influencer les décisions dans des litiges à trancher en application de l'art. 100 CBE ou d'être formulées à propos d'éléments dont la modification s'avère nécessaire en raison même de ces litiges. Telle a été, dans l'affaire T 127/85 (JO 1989, 271), l'opinion de la chambre, qui a ajouté que la procédure d'opposition risquerait de conduire à des abus si le titulaire du brevet était autorisé à réarranger et à parfaire l'exposé en apportant des modifications qui, quoique conformes à l'art. 123 CBE, ne sont pas nécessaires pour répondre aux motifs d'opposition proprement dits. Voir aussi T 89/89 et T 324/89.
Conformément à la jurisprudence constante des chambres de recours, l'art. 84 CBE représente une disposition de la CBE qui doit être prise en considération dans la procédure d'opposition chaque fois que le titulaire du brevet apporte des modifications (dans les limites énoncées dans la décision G 3/14, JO 2015, A102 ; cf. IV.C.5.2.2). Cependant, il n'en reste pas moins que l'art. 84 CBE ne constitue pas en lui-même un motif d'opposition au titre de l'art. 100 CBE. Indépendamment de la formulation des revendications du brevet tel que délivré et du fait qu'elles soient dépendantes ou indépendantes, une opposition ne peut pas être formée au motif que les revendications manquent de clarté (T 23/86, JO 1987, 316 ; T 565/89 ; T 89/89 ; T 16/87, JO 1992, 212 ; T 1835/08 ; T 1855/07). Dans l'affaire T 89/89, la chambre a suivi les conclusions de la décision T 295/87 (JO 1990, 470), selon lesquelles il convient de considérer les modifications apportées pendant la procédure orale comme appropriées et nécessaires au sens des règles 57(1) et 58(2) CBE 1973 (règles 79(1) et 81(3) CBE) et donc recevables uniquement si elles peuvent raisonnablement être considérées comme découlant des motifs d'opposition. Elle a donc jugé les modifications proposées (qui consistaient à rectifier la forme en deux parties de la revendication 1 et à clarifier le sens de sa dernière caractéristique, mais n'étaient pas pertinentes pour la décision relative aux motifs d'opposition) comme irrecevables. Dans l'affaire T 792/95, la chambre a également confirmé le principe selon lequel seules les modifications qui sont rendues nécessaires compte tenu des motifs d'opposition au sens de l'art. 100 CBE peuvent être effectuées pendant la procédure d'opposition et les procédures de recours qui s'ensuivent (citant les décisions T 23/86, JO 1987, 316 ; T 127/85, JO 1989, 271 et T 168/85).
Ce principe fut suivi par la chambre dans la décision T 113/86 qui s'est déclarée défavorable à l'admission de modifications proposées par le titulaire du brevet qui ne sont pas nécessaires pour répondre aux motifs d'opposition et risquent d'entraîner une interprétation différente du fascicule de brevet. En effet, la protection conférée par le brevet risque d'être étendue si, à la suite de modifications apportées pour clarifier les revendications qui ont été autorisées, ces revendications sont susceptibles de faire l'objet d'une interprétation plus large que celle qu'en aurait donnée un tribunal en application de l'art. 69 CBE. La chambre a estimé toutefois que la suppression d'une incohérence entre une revendication et la description devrait être admise si cette incohérence résulte d'une erreur, à condition qu'à la lecture du fascicule de brevet dans son ensemble cette erreur soit si évidente pour l'homme du métier qu'un tiers intéressé aurait pu prévoir l'étendue de la protection conférée par la revendication modifiée. Dans une telle hypothèse, la requête en correction d'une erreur ne constitue pas un recours abusif à la procédure d'opposition. En outre, la suppression de cette incohérence va dans le sens de la sécurité juridique.
Lorsqu'une irrégularité consiste en une discordance entre la description et la revendication, il existe dans l'exposé de l'invention un manque de clarté qui ne relève pas de l'art. 84 CBE mais de l'art. 83 CBE, et peut donc être pris en considération dans la procédure d'opposition (voir par ex. T 175/86).