L'affaire T 1930/14 concernait une méthode de purification d'anticorps. La division d'opposition avait considéré notamment que l'objet de la revendication 1 de la requête principale n'était pas nouveau. Le requérant (titulaire du brevet) a fait valoir que la revendication 1 portait uniquement sur les méthodes dans lesquelles les anticorps monomères sont séparés des agrégats grâce à une étape de faible échange de cations CM. Il a aussi soutenu que la revendication devait être interprétée conformément aux principes énoncés dans la décision T 1931/14. Selon le requérant, la finalité indiquée dans la revendication, à savoir "purifier de ses agrégats un anticorps monoclonal", définissait l'application ou l'usage de la méthode revendiquée (par opposition à son effet). Conformément à la décision T 1931/14, cette finalité devait être considérée comme étant une caractéristique technique fonctionnelle indiquée dans la revendication, c'est-à-dire qu'elle représentait une limitation de la méthode. La chambre a estimé que la conclusion tirée dans la décision T 1931/14, selon laquelle lorsque la finalité indiquée définit l'application spécifique du procédé, elle nécessite en fait certaines étapes supplémentaires qui ne sont ni implicites ni inhérentes aux autres étapes restantes définies dans la revendication, et sans lesquelles le procédé revendiqué ne permettrait pas d'atteindre la finalité indiquée (point 2.2.4 des motifs), ne peut valoir que dans des cas où il apparaît, sans aucune ambiguïté possible, que la finalité implique de telles étapes et où la nature de ces étapes ne présente aucune ambiguïté. Dans l'affaire en cause T 1930/14, la chambre ne pouvait identifier aucune indication, ni dans la revendication ni dans la description, qui conduirait l'homme du métier à comprendre que la finalité déclarée "pour purifier de ses agrégats un anticorps monoclonal" impliquait que la méthode revendiquée contenait des étapes supplémentaires. La méthode revendiquée ne contenait aucune étape supplémentaire implicite en vertu de sa finalité. Par conséquent, et contrairement à l'avis du requérant, il n'y avait aucune étape, prétendument impliquée par la finalité, qui servait à différencier la méthode revendiquée de celle divulguée dans le document D1. La revendication 1 ne satisfaisait pas aux exigences de l'art. 54 CBE.
Dans l'affaire T 1931/14, la chambre a décidé que, dans le contexte d'un procédé, il importe de distinguer entre différents types d'objectifs déclarés, à savoir ceux qui définissent l'application ou l'utilisation d'un procédé, et ceux qui définissent un effet découlant des étapes du procédé. Lorsque l'objectif déclaré définit l'application spécifique du procédé, il nécessite certaines étapes supplémentaires qui ne sont pas implicites dans les caractéristiques restantes et sans lesquelles le procédé revendiqué ne permettrait pas d'atteindre l'objectif déclaré. En revanche, lorsque l'objectif énonce simplement un effet technique qui se produit inévitablement lors de la réalisation des autres étapes du procédé revendiqué et qui est donc inhérent à ces étapes, un tel effet technique n'a pas d'effet limitant, car il ne permet pas de distinguer le procédé revendiqué d'un procédé connu.
5.2.5 Caractéristiques fonctionnelles
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Dans l'affaire T 500/89, ce ne fut qu'en raison de l'approche du contenu global qu'une antériorité a pu être considérée comme ne détruisant pas la nouveauté, parce que le procédé décrit dans l'antériorité se distinguait du procédé revendiqué par une caractéristique fonctionnelle. L'objet de l'invention était un procédé permettant de déposer simultanément plusieurs couches de produits de revêtement photographique fluides pour la fabrication de produits photographiques. Dans l'antériorité étaient indiquées les plages de valeurs pour l'épaisseur des couches, la viscosité, la vitesse de dépôt etc. utilisées dans le procédé revendiqué. Pourtant l'invention était nouvelle. En effet, ce qu'enseignait l'antériorité, c'était que les plages de valeurs devaient être choisies de manière à ce que deux couches déterminées se mélangent. Le brevet attaqué énonçait une autre règle de mesure puisque, selon ses revendications, le dépôt des couches devait être effectué "sensiblement sans aucun mélange". L'indication dans l'antériorité du résultat à atteindre, le "mélange", n'était pas une simple indication de but ne pouvant faire partie des caractéristiques techniques du procédé décrit, c'était bel et bien une caractéristique fonctionnelle au sens d'une règle de mesure, et cette caractéristique constituait une part essentielle de l'enseignement de ce document.
Selon la jurisprudence constante, lorsqu'une revendication concerne un dispositif différant d'un dispositif connu seulement par l'utilisation indiquée, alors l'utilisation n'est pas une caractéristique du dispositif, ce qui signifie que deux dispositifs (ne différant que par l'utilisation envisagée) sont identiques en termes de structure. Si le dispositif connu convient à l'utilisation revendiquée, l'invention revendiquée manque de nouveauté. Or, la situation est toute différente lorsque la revendication a trait à un procédé. Dans ce cas, la caractéristique tenant à l'utilisation est une caractéristique fonctionnelle du procédé comparable en catégorie aux autres caractéristiques (étapes) du procédé (T 848/93 citée dans l'affaire T 1931/14). Dans l'affaire T 1931/14, l'opposant avait également fait référence à la décision T 304/08, mais la chambre a déclaré que la situation dans l'affaire T 304/08 était très différente. Dans l'affaire T 1931/14, la chambre a conclu que les affaires T 848/93 et T 304/08 démontraient que, dans le contexte d'un procédé, il importait de distinguer entre différents types d'objectifs déclarés, à savoir ceux qui définissent l'application ou l'utilisation d'un procédé, et ceux qui définissent un effet découlant des étapes du procédé et qui y sont implicites dans celui-ci. Lorsque l'objectif déclaré définit l'application spécifique du procédé, il nécessite en fait certaines étapes supplémentaires qui ne sont ni implicites ni inhérentes aux autres étapes restantes définies dans la revendication, et sans lesquelles le procédé revendiqué ne permettrait pas d'atteindre l'objectif déclaré. De cette manière, l'application déclarée représente une véritable limitation technique du procédé et le procédé revendiqué doit être appliqué de cette manière. En revanche, lorsque l'objectif énonce simplement un effet technique qui se produit inévitablement lors de la réalisation des autres étapes du procédé revendiqué et qui est donc inhérent à ces étapes, un tel effet technique n'a pas d'effet limitant, car il ne permet pas de distinguer le procédé revendiqué d'un procédé connu.
Dans l'affaire T 872/09, la chambre a indiqué que le capteur revendiqué était défini par référence aux caractéristiques de sa réponse lors de son utilisation dans un système de mesure. Aucun des aspects déterminants de ce système n'ayant été défini dans la revendication 1, les caractéristiques techniques du capteur revendiqué permettant d'effectuer la mesure visée dans la revendication demeuraient obscures. Or, afin de garantir la sécurité juridique, un objet revendiqué ne saurait être considéré comme nouveau par rapport à l'état de la technique sur la base d'une caractéristique ambiguë (cf. T 1049/99). Par conséquent, le fait de définir une caractéristique fonctionnelle du capteur électrochimique revendiqué sans préciser les conditions de fonctionnement correspondantes ne permettait pas de distinguer ledit capteur des capteurs électrochimiques de l'état de la technique.
L'affaire T 2170/13 traitait de la reformulation de la revendication 1 en tant que revendication de procédé (requête subsidiaire). La chambre reprend l'approche dans T 1822/12, que la décision G 2/88 (relative aux caractéristiques techniques fonctionnelles) ne concernait qu'une revendication d'utilisation, à savoir une revendication portant sur la nouvelle utilisation d'un composé connu, que la jurisprudence avait constamment interprété la décision G 2/88 de manière très restrictive et qu'il n'y avait aucune possibilité d'étendre les conclusions de G 2/88 et G 6/88 à une revendication rédigée autrement. Par conséquent, l'objectif non divulgué ne pouvait pas être considéré comme une caractéristique technique fonctionnelle distinctive de la revendication. Par ailleurs (requête principale), la chambre consacre de longs développements techniques pour conclure que la dernière caractéristique revendiquée était implicitement divulguée dans l'art antérieur D1.
La notion de "moyens", au pluriel, est une notion usuelle fréquemment employée dans la rédaction de demandes de brevet, notamment utilisée dans le cadre de définitions fonctionnelles. Elle ne saurait, véritablement, exclure la présence d'un élément de structure unique (T 1794/12).
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