5.1. Conditions requises pour l'attribution d'une date de dépôt
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La date de dépôt d'une demande de brevet européen est celle à laquelle il est satisfait aux exigences prévues par le règlement d'exécution (art. 80 CBE, applicable aux demandes de brevet européen déposées à compter du 13 décembre 2007). Les dispositions détaillées relatives aux exigences à remplir ont été transférées vers le règlement d'exécution (règle 40 CBE). Ces exigences incluent :
- une indication selon laquelle un brevet européen est demandé ;
- les indications qui permettent d'identifier le demandeur ou de prendre contact avec lui (cf. présent chapitre IV.A.5.2.) ;
- une description ou un renvoi à une demande déposée antérieurement.
La demande de brevet doit être déposée soit auprès de l'OEB, soit auprès des autres autorités compétentes, conformément à l'art. 75(1) CBE.
Si une date de dépôt ne peut être accordée après l'examen effectué au titre de l'art. 90(1) CBE, la demande n'est pas traitée en tant que demande de brevet européen (art. 90(2) CBE).
Selon la décision G 2/95 (JO 1996, 555), l'art. 80 CBE 1973 fixe les conditions minimales qui doivent être remplies pour l'attribution d'une date de dépôt. Aux termes de l'art. 80 d) CBE 1973 (cf. R. 40 CBE), les documents produits par le demandeur doivent contenir une description et une ou plusieurs revendications (conformément à l'art. 14 CBE 1973, qui a été considérablement modifié dans la CBE 2000). Mais il n'est pas prévu dans cette disposition que la description et les revendications doivent être conformes aux autres exigences de la CBE 1973. Il suffit donc que les pièces de la demande qui ont été produites contiennent à l'évidence une description et une ou plusieurs revendications. Par contre, si les pièces de la demande ne contiennent pas de description ou de revendications, les conditions énoncées à l'art. 80 d) CBE 1973 pour l'attribution d'une date de dépôt ne sont pas remplies et ne peuvent pas non plus l'être a posteriori par le biais d'une rectification effectuée en vertu de la règle 88 CBE 1973 (voir la règle 139 CBE et le présent chapitre IV.A.5.5.). Si les pièces de la demande sont conformes aux exigences de l'art. 80 CBE 1973, une date de dépôt est attribuée à la demande de brevet européen.
Dans la décision J 18/86 (JO 1988, 165), la chambre a constaté que, conformément à la règle 24 CBE 1973 ensemble l'art. 75(1)b) CBE 1973, la date de dépôt d'une demande de brevet européen correspond toujours à la date à laquelle les pièces de la demande sont effectivement reçues soit directement par l'OEB, soit par un service national compétent. La CBE 1973 n'admet en aucun cas la possibilité d'appliquer une disposition du droit national pour déterminer la date de dépôt d'une demande de brevet européen.
Dans l'affaire J 4/87 (JO 1988, 172), la chambre a déclaré qu'en cas d'inobservation d'un délai causée par une défaillance imprévisible des services postaux et si la règle 85(2) CBE 1973 (concernant une interruption générale ou une perturbation subséquente de la distribution du courrier dans les Etats contractants) n'est pas d'application pour proroger le délai, l'OEB n'a pas le pouvoir discrétionnaire d'accorder une prorogation. Les principes énoncés dans la décision J 18/86 ci-dessus ayant été appliqués, la date de dépôt était la date à laquelle l'OEB ou un service national compétent avait effectivement reçu la demande. Voir également la décision J 13/05.
Dans l'affaire J 12/05, la chambre de recours juridique a suivi les décisions J 4/87 et J 18/86, en constatant qu'il n'est pas possible d'avancer la date de dépôt en vertu des dispositions de la CBE. Elle a par ailleurs déclaré que, même si les conditions nécessaires pour une prolongation du délai de priorité soit en vertu de la règle 84bis CBE 1973, soit de la règle 85 CBE 1973 sont réunies, cela ne saurait avoir pour conséquence de modifier la date de dépôt. Ici intervient au contraire la fiction juridique de l'observation du délai, bien que la date de dépôt soit effectivement postérieure à la date d'expiration du délai de priorité.
Dans l'affaire T 382/94 (JO 1998, 24), les revendications et la description avaient été déposées en allemand, mais les dessins incluaient un texte en anglais. La chambre a déclaré que pour l'attribution d'une date de dépôt, la CBE 1973 n'exige pas que les textes figurant dans les dessins soient rédigés dans la même langue que celle qui a été utilisée dans la description et les revendications, conformément à l'art. 14(1) et (2) CBE 1973. Si les dessins ont tous été déposés à la date du dépôt de la demande, ils font partie du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée à l'origine, même s'ils contiennent des textes rédigés dans une langue officielle autre que la langue de la procédure. Les exigences linguistiques applicables aux demandes de brevet européen ont été modifiées dans la CBE 2000 (voir chapitre III.F.1. "Langue et date de dépôt d'une demande de brevet européen").
Dans l'affaire J 1/12, le requérant avait déposé une demande de brevet européen auprès de l'Office de la propriété intellectuelle du Royaume-Uni avec les mêmes pièces que celles sur lesquelles s'appuyait la demande qu'il avait déposée ultérieurement auprès de l'OEB. La demande déposée au Royaume-Uni n'était jamais parvenue à l'OEB. La chambre de recours juridique devait donc examiner s'il était justifié, contrairement à ce qui est énoncé à l'art. 80 CBE 1973, d'attribuer à la demande la date antérieure de dépôt (art. 75(1)b) CBE 1973). L'art. 77(2) CBE 1973 dispose que les demandes de brevet européen déposées auprès des États membres doivent être transmises à l'OEB dans un délai de six semaines après leur dépôt. L'art. 77(5) CBE 1973 complète cette disposition en énonçant que les demandes de brevet européen qui ne parviennent pas à l'OEB dans le délai visé sont réputées retirées. La demande déposée auprès de l'Office de la propriété intellectuelle du Royaume-Uni était donc réputée retirée. La restitutio in integrum était exclue. Dans ce cas de figure, le législateur a prévu expressément à la dernière phrase de l'art. 77(5) CBE 1973 que les taxes de dépôt, de recherche et de désignation sont restituées. De plus, les art. 135(1)a) CBE 1973 et art. 136(2) CBE 1973 prévoient la possibilité de transformer la demande de brevet européen perdue en demande de brevet national. Il s'ensuit que les auteurs de la CBE avaient clairement identifié les conséquences sévères de l'art. 77(5) CBE 1973 pour les demandeurs. Malgré cela, le législateur n'a fourni aucun moyen aux demandeurs pour recouvrer une demande perdue.