5.4 Variétés végétales et races animales, procédés essentiellement biologiques d'obtention de végétaux ou d'animaux
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Les exceptions à la brevetabilité visées à l'art. 53b) comprennent "les variétés végétales ou les races animales ainsi que les procédés essentiellement biologiques d'obtention de végétaux ou d'animaux".
La règle 28(2) exclut les produits (végétaux/animaux et parties de végétaux/animaux) obtenus exclusivement par des procédés non techniques, à savoir essentiellement biologiques. Cette exclusion des végétaux et animaux obtenus exclusivement au moyen d'un procédé essentiellement biologique s'applique aux demandes de brevet ayant une date de dépôt et/ou de priorité postérieure au 1er juillet 2017. Elle ne s'applique pas aux brevets délivrés avant cette date ni aux demandes de brevet en instance ayant une date de dépôt et/ou de priorité antérieure au 1er juillet 2017 (cf. G 3/19, JO OEB 2020, A119).
L'exclusion s'étend aux végétaux et animaux obtenus exclusivement au moyen d'un procédé essentiellement biologique qui n'inclut aucune intervention technique directe dans le génome des végétaux ou des animaux, puisque ledit procédé ne consiste qu'à croiser les lignées parentales des végétaux ou animaux et à sélectionner la descendance recherchée. Cela vaut même si un moyen technique est fourni dans le but de permettre ou de soutenir l'exécution des étapes essentiellement biologiques. Sont en revanche brevetables les végétaux et animaux obtenus par un procédé technique qui modifie leurs caractères génétiques.
Dans ce contexte, le terme "exclusivement" est employé pour indiquer qu'un végétal ou un animal issu d'un procédé technique ou caractérisé par une intervention technique dans le génome ne tombe pas sous le coup de l'exclusion de la brevetabilité, même si une méthode non technique (croisement et sélection) est également utilisée pour l'obtenir.
Pour déterminer si un végétal ou un animal est obtenu par des moyens exclusivement biologiques, il faut examiner si un caractère héritable de l'organisme revendiqué présente un changement qui résulte d'un procédé technique allant au-delà d'un simple procédé de croisement et de sélection, autrement dit n'ayant pas pour seul but de permettre ou de soutenir l'exécution des étapes du procédé essentiellement biologique.
Par conséquent, les végétaux transgéniques et les mutants induits de manière technique sont brevetables, tandis que les produits de procédés d'obtention classiques ne le sont pas.
À la fois la mutagénèse dirigée, par exemple par le système CRISPR/Cas, et la mutagénèse aléatoire, par exemple induite par les UV, constituent de tels procédés techniques. Si la descendance d'organismes transgéniques ou de mutants est également porteuse de la mutation ou du transgène, cette descendance n'a pas été obtenue exclusivement par un procédé essentiellement biologique et elle est donc brevetable.
De plus, pour qu'une matière vivante soit brevetable, il doit être possible de la reproduire d'une manière qui présente exactement les mêmes caractéristiques techniques. La reproductibilité peut être assurée par exemple :
(1) par un dépôt de la matière vivante (graines, souches microbiologiques). La matière déposée doit être accessible au public et l'invention doit pouvoir être effectivement reproduite à partir d'elle. Si, par exemple, un caractère nouveau et inventif est dû à un seul transgène, l'homme du métier peut reproduire l'invention à partir d'un échantillon vivant. Si, en revanche, le caractère revendiqué dépend d'un grand nombre de loci structurellement indéfinis dans le génome, ceux-ci subiront une ségrégation dans les générations ultérieures, si bien que la reproduction de l'invention à partir de l'échantillon déposé impliquera un effort excessif (T 1957/14).
(2) en divulguant, dans la demande telle que déposée, la séquence génétique responsable du caractère revendiqué avec des instructions sur la façon d'introduire de manière reproductible, à l'aide de moyens techniques, une telle séquence altérée dans un organisme cible (p. ex. par la méthode CRISPR-Cas).
Si une caractéristique technique d'un végétal ou d'un animal revendiqué (par exemple l'échange d'un nucléotide unique dans le génome) peut résulter soit d'une intervention technique (par exemple d'une mutagénèse dirigée) soit d'un procédé essentiellement biologique (par exemple d'un allèle naturel), un disclaimer est nécessaire pour limiter l'objet revendiqué au produit obtenu par des moyens techniques afin de satisfaire aux exigences de l'art. 53b) et de la règle 28(2). À défaut, l'objet a trait à un objet exclu et devra être rejeté au titre de l'art. 53b) ensemble la règle 28(2). Un disclaimer est nécessaire dans tous les cas, en particulier même si la description ne mentionne qu'un procédé d'obtention technique et reste muette quant à l'utilisation d'un procédé essentiellement biologique. Si, en revanche, il est sans conteste que la caractéristique concernée ne peut résulter que d'une intervention technique (par exemple d'un transgène), aucun disclaimer n'est nécessaire.
Cela vaut également si un tel disclaimer porte sur un objet qui n'était pas divulgué dans la demande telle que déposée. En pareil cas, le disclaimer remplit les conditions énoncées dans les décisions G 1/03, G 2/03 et G 1/16 car il est introduit pour exclure un objet non susceptible d'être protégé par brevet (s'agissant des principes généraux qui régissent les disclaimers, voir également le point H‑V, 4).
Un tel disclaimer ne sera nécessaire que pour les demandes de brevet ayant une date de dépôt et/ou de priorité postérieure au 1er juillet 2017. Un disclaimer ne sera pas nécessaire pour les brevets délivrés avant cette date ou pour les demandes de brevet en instance ayant une date de dépôt et/ou de priorité antérieure au 1er juillet 2017 (cf. G 3/19, JO OEB 2020, A119).
Le caractère technique d'un produit végétal ou animal revendiqué peut résider dans une caractéristique physique non héritable qui est conférée directement à l'organisme revendiqué, par exemple dans le cas d'une graine enrobée d'une substance chimique ayant un effet bénéfique.
Le procédé technique d'obtention du végétal ou de l'animal peut être inclus dans les revendications, sous la forme de revendications de produit caractérisé par son procédé d'obtention (cf. F‑IV, 4.12).
Les produits végétaux qui ne sont pas du matériel de reproduction, comme la farine, les sucres ou les acides gras, doivent être examinés sur la seule base de leurs propriétés chimiques. Par conséquent, pour autant que les conditions générales de brevetabilité soient remplies, la question de savoir si l'objet (par exemple une molécule de sucre) est isolé du produit (par exemple un végétal vivant) d'un procédé essentiellement biologique ou s'il est obtenu en laboratoire n'est pas pertinente.
Des exemples figurent ci-dessous au point G‑II, 5.4.2.1.
L'exclusion concernant les végétaux et animaux obtenus exclusivement au moyen d'un procédé essentiellement biologique ne s'applique pas aux brevets délivrés avant le 1er juillet 2017, ni aux demandes de brevet en instance ayant une date de dépôt et/ou de priorité antérieure à cette date (cf. G 3/19, JO OEB 2020, A119).
Pour ces demandes et ces brevets délivrés, l'exclusion de la brevetabilité des procédés essentiellement biologiques d'obtention de végétaux n'a pas d'effet négatif sur l'admissibilité d'une revendication de produit portant sur des végétaux ou une matière végétale telle que des graines ou d'autres matières de reproduction végétale. Cela vaut même si l'unique méthode disponible, à la date de dépôt, pour obtenir les végétaux ou matières végétales revendiqués est un procédé essentiellement biologique d'obtention de végétaux, et même si le produit revendiqué est défini en fonction d'un tel procédé (revendication de produit caractérisé par son procédé d'obtention, cf. F‑IV, 4.12). Dans ce contexte, il est sans importance que la protection conférée par la revendication de produit englobe l'obtention du produit, tel que revendiqué, au moyen d'un procédé essentiellement biologique d'obtention de végétaux (cf. G 2/12 et G 2/13). Ce même principe s'applique par analogie aux animaux obtenus au moyen de procédés essentiellement biologiques (cf. également F‑IV, 4.12).
Pour les demandes de brevet dont la date de dépôt et/ou de priorité est le 1er juillet 2017 ou une date ultérieure, si les caractéristiques techniques d'un végétal ou d'un animal revendiqué sont attribuables à une étape technique, la description ne peut pas contenir de référence à des procédés essentiellement biologiques (comme le criblage de populations sauvages ou l'obtention classique) en tant qu'autre procédé d'obtention du végétal ou de l'animal revendiqué. Si de telles références ont été faites, elles doivent être retirées car elles n'entrent pas dans la portée des revendications. En sus du disclaimer dans les revendications, la description doit être adaptée de manière à la rendre conforme aux revendications (cf. F‑IV, 4.3), mais il n'est pas nécessaire de prévoir un disclaimer supplémentaire dans la description. Les références à des procédés essentiellement biologiques pour la multiplication ou le transfert d'un caractère obtenu par des moyens techniques, par exemple la mutagénèse, peuvent quant à elles continuer de figurer dans la description, même si de tels procédés ne peuvent pas être revendiqués.