CHAMBRES DE RECOURS
Décisions de la Grande Chambre de recours
Décision de la Grande Chambre de recours, en date du 10 décembre 1999 - G 1/97
(Langue de la procédure)
Composition de la Chambre :
Président : | P. Messerli |
Membres : | J.-C. De Preter |
Partie de droit : ETA S.A. Fabriques d'Ebauches
Parties intervenantes : Piranha Marketing GmbH
Junghans Uhren GmbH
Référence : Requête en vue d'une révision/ETA
Article : 21, 23(1)(3), 24, 106(1), 110(1), 111(1), 113, 114, 116, 121, 122, 125, 127 CBE
Règle : 10(2), 11, 65(1), 66(2), 67, 89, 90, 92(1)(2) CBE
Article : 10 RPCR
Article : 11bis, 11ter RPGCR
Article : 23 RDMA
Article : 31, 32, 62(5) ADPIC (TRIPs)
Article : 31(3) Conv. Vienne sur le droit des traités
Mot-clé : "Suites administratives ou juridictionnelles à réserver aux requêtes fondées sur la violation alléguée d'un principe fondamental de procédure et qui tendent à la révision d'une décision passée en force de chose jugée prise par une chambre de recours" - "Inscription au Registre européen des brevets"
Sommaire
I. Dans le cadre de la Convention sur le brevet européen, il convient de réserver une suite juridictionnelle d'irrecevabilité aux requêtes fondées sur la violation alléguée d'un principe fondamental de procédure et qui tendent à la révision d'une décision passée en force de chose jugée prise par une chambre de recours de l'OEB.
II. La décision d'irrecevabilité appartient à la chambre de recours qui a pris la décision dont la révision est demandée. Elle pourra être rendue immédiatement et sans autre formalité processuelle.
III. Cette suite juridictionnelle ne vaut que pour lesdites requêtes dirigées contre une décision d'une chambre de recours portant une date postérieure à celle de la présente décision.
IV. Lorsque la division juridique de l'OEB est appelée à statuer quant à l'inscription au Registre européen des brevets d'une requête dirigée contre une décision d'une chambre de recours, elle doit s'abstenir de prescrire cette inscription s'il apparaît que, quelle qu'en soit la forme, cette requête est fondée sur la violation alléguée d'un principe fondamental de procédure et tend à la révision d'une décision passée en force de chose jugée prise par une chambre de recours.
Exposé des faits et conclusions
I. Suite au recours des opposants, la chambre de recours 3.5.2 a, par décision du 25 novembre 1991, prononcé la révocation du brevet européen n° 0 098 239 de la société ETA S.A. Fabriques d'Ebauches (affaire T 456/90).
II. Le 16 janvier 1992 cette société (ci-après ETA) a déposé plusieurs requêtes devant les chambres de recours, notamment une requête en restitutio in integrum, un acte de recours, une requête sur la base de la règle 89 CBE contenant des moyens analogues à ceux développés dans la requête en restitutio et une requête en poursuite de la procédure.
III. En ce qui concerne la requête en restitutio in integrum, ETA a invoqué qu'elle n'avait pas déposé de revendications modifiées dans les délais bien qu'ayant fait preuve de toute la vigilance nécessitée par les circonstances. En particulier, la chambre 3.5.2 n'ayant pas fait état pendant la procédure de recours ni lors de la procédure orale de ce qu'elle envisageait de révoquer le brevet européen, le mandataire d'ETA n'avait pu se rendre compte de ce que le dépôt de revendications modifiées eût été nécessaire. De plus, un jour après la procédure orale, à l'issue de laquelle il fut annoncé que la décision serait rendue par écrit, ETA avait même écrit qu'elle était prête à modifier les revendications si la chambre l'estimait nécessaire.
D'autre part, ETA a fait valoir que les droits de la défense et les principes de bonne foi avaient été violés puisque la chambre 3.5.2 s'était basée dans sa décision sur un nouveau moyen pour révoquer le brevet et, sans préavis, sur un document qui avait été écarté par la Division d'opposition.
IV. Dans son acte de recours, ETA a invoqué que la décision de révocation avait été prise par une chambre exerçant les compétences de la division d'opposition conformément à l'article 111(1) CBE et que, dès lors, sa décision était susceptible de recours.
V. Le 31 juillet 1992, le Président de la chambre 3.5.2, agissant en ladite qualité et en tant que responsable de l'administration de cette chambre, a écrit à ETA que ses requêtes ne reposaient sur aucune base juridique dans le cadre de la CBE et que dès lors il n'y serait pas donné suite. Le 28 septembre 1992, le Vice-Président de la DG3 a écrit à ETA qu'aucune instance ne pouvait reconsidérer la décision définitive de la chambre 3.5.2. Il ne pouvait donc être question de réouverture de la procédure de recours par le biais d'une requête en restitutio in integrum ou d'ouverture d'un nouveau recours. Les taxes de recours et de restitutio in integrum furent remboursées en octobre 1992.
VI. Le 11 novembre 1992 ETA a déposé deux requêtes auprès de la division juridique :
- l'une tendant à l'inscription dans le Registre européen des brevets de la date de dépôt de sa requête en restitutio in integrum déposée le 16 janvier 1992 ;
- l'autre tendant à la correction dudit Registre par la mention qu'un recours ayant un effet suspensif avait été déposé le 16 janvier 1992.
VII. Suite à la décision du 7 février 1994 de la chambre de recours juridique (ci-après "chambre juridique"), relative à un incident survenu après le dépôt desdites requêtes (J 2/93, JO OEB 1995, 675), la division juridique a statué en date du 5 août 1994 sur ces requêtes ; elle s'est déclarée incompétente en exposant qu'elle n'était compétente quant aux requêtes relatives aux mentions à apporter au Registre européen des brevets que lorsque lesdites requêtes s'inscrivaient dans le cadre d'une procédure prescrite par la CBE. Or, la décision T 456/90 avait été rendue en dernier ressort et avait force de chose jugée, entraînant ainsi la clôture de toutes les procédures prescrites par la CBE pour le brevet en cause.
VIII. Dans le cadre du recours de ETA contre cette décision, la chambre juridique a statué dans sa décision du 28 février 1997 (J 3/95, JO OEB 1997, 493) ainsi qu'il suit :
"Les questions suivantes concernant un point de droit fondamental sont soumises à la Grande Chambre de recours :
1. Dans le cadre de la Convention sur le brevet européen, quelles suites administratives ou juridictionnelles convient-il de réserver aux requêtes fondées sur la violation alléguée d'un principe fondamental de procédure et qui tendent à la révision d'une décision passée en force de chose jugée prise par une chambre de recours ?
2. Convient-il, le cas échéant, d'en prescrire l'inscription sur le Registre européen des brevets ?"
Au point 3 des motifs de la décision, la chambre juridique a constaté que toutes les requêtes présentées par ETA suite à la décision T 456/90, quelle que soit la qualification qui leur ait été attribuée, tendaient à obtenir la révision de cette décision et, dans cette attente, à ce que ses effets soient suspendus. Elle en a déduit que la décision qu'il convenait de prendre dépendait, d'une part, de la réponse à la question de savoir quelles suites devaient être réservées à de telles requêtes et, d'autre part, si de telles suites devaient ou non faire l'objet de mentions dans le Registre européen des brevets.
Trois types de suites ont alors été envisagés, qui font l'objet des points 4 à 7, 8 et 9 des motifs de la décision.
En ce qui concerne la première suite, c'est-à-dire la réouverture de la procédure de recours ou l'ouverture d'un nouveau recours, la chambre, se référant aux articles 21(1) et 106(1) CBE, a exposé que les décisions des chambres de recours, qui mettent un terme au recours, sont définitives et prennent force de chose jugée. Ainsi, la juridiction dont la décision est passée en force de chose jugée ne peut plus revenir sur sa décision. Seule reste, en règle générale, la possibilité de corriger les erreurs manifestes de caractère purement matériel (cf. R. 89 CBE). Ces décisions ne sont plus susceptibles d'un recours suspensif d'exécution et ne peuvent être remises en cause que par d'éventuelles voies de recours extraordinaires, légalement ouvertes à cet effet. En outre, la chambre a souligné les inconvénients qui pourraient résulter de la réouverture d'un dossier ou de l'ouverture d'un nouveau recours, et en particulier les risques d'allonger inconsidérément la procédure de délivrance.
Quant à la deuxième suite telle qu'elle a été réservée par le Président de la chambre technique 3.5.2 et par le Vice-Président en charge des chambres de recours et qui constitue une fin de non-recevoir de nature purement administrative, la chambre juridique se limite à constater que cette suite est celle retenue depuis la création des chambres de recours et qu'elle est fortement contestée par ETA.
Pour ce qui concerne la troisième suite, la suite juridictionnelle spécifique, la chambre juridique a relevé que dans nombre d'Etats contractants, ainsi que devant la Cour de justice des Communautés européennes, la loi institue une telle voie, souvent qualifiée d'extraordinaire, ouverte contre des décisions passées en force de chose jugée et n'ayant généralement pas d'effet suspensif. A cet égard, la chambre a relevé aussi que les textes de la CBE n'instituent pas de procédures semblables.
Au point 10 des motifs de la décision, la chambre juridique a exposé que la question de savoir par quel moyen administratif ou juridictionnel les chambres de recours doivent répondre à des requêtes telles que celles présentées en l'espèce soulevait une question de droit d'importance fondamentale, ni la CBE ni la jurisprudence ou les pratiques procédurales ou administratives des chambres de recours ne fournissant de réponse claire.
D'autre part, selon la chambre juridique se posait en corollaire la question de savoir si la procédure qui serait retenue devait ou non faire l'objet d'une mention sur le Registre européen des brevets.
IX. Dans ses premières observations du 21 janvier 1998 ETA a exposé essentiellement ce qui suit :
a) Chaque voie qu'elle a utilisée correspond à une procédure prévue par la CBE. Ainsi, selon les règles qui gouvernent la requête en restitutio in integrum, et les requêtes selon la règle 89 et l'article 114 CBE, il appartient à la chambre de recours technique de constater la violation d'un principe fondamental de procédure affectant la décision du 25 novembre 1991, puis de constater la nullité de cette décision afin de rétablir la situation procédurale antérieure. Il s'agit du mécanisme même de la restitutio in integrum, que la jurisprudence a confirmé (cf. décision W 3/93, point 2.4 des motifs).
Dans la voie de recours selon l'article 106 CBE, elle a demandé à la Chambre de recours technique de statuer tout d'abord sur la recevabilité et le bien-fondé du grief de violation d'un principe fondamental de procédure entachant la décision du 25 novembre 1991. Si la Chambre de recours technique admet l'un et l'autre, la décision sera annulée et la procédure au fond réouverte, comme dans le cas de rétablissement dans un droit. Si la Chambre, tout en n'admettant pas la recevabilité de la voie de droit en tant qu'elle est dirigée contre une décision de la Chambre de recours, constate néanmoins la nullité de cette décision en raison de la violation d'un principe fondamental de procédure, la procédure devra être également réouverte.
b) La Chambre juridique a noté que les requêtes de ETA tendent toutes à suspendre les effets de la décision du 25 novembre 1991 en attendant sa révision. Toutefois la requête en restitutio in integrum n'a pas d'effet suspensif dans le système de la CBE. Dès lors, un tel effet n'est pas sollicité par ETA.
Le recours a, quant à lui, un effet suspensif de droit (article 106(1) CBE). Il le conserve aussi longtemps que la chambre saisie ne statue pas sur la recevabilité et, si celle-ci est admise, le bien-fondé du recours (règle 65 et article 110(1) CBE). L'effet suspensif a pour conséquence que la décision de révocation du 25 novembre 1991 n'est pas entrée en vigueur. ETA a donc demandé que le Registre européen des brevets reflète correctement cette situation juridique, ce qui implique que soit supprimée la mention de la décision de révocation (en ajoutant éventuellement, pour la clarté de l'inscription, la mention du recours déposé contre cette décision). Ainsi, s'il est exact de relever que les procédures intentées par ETA tendent à la constatation de la nullité, respectivement à l'annulation de la décision de révocation du 25 novembre 1991 et à la réouverture de la procédure, il n'en est pas moins vrai que ces procédures s'inscrivent dans le cadre de la CBE. Si la chambre de recours juridique n'a pas explicitement abordé cette question dans sa motivation, ETA est quant à elle d'avis que l'annulation - ou la constatation de la nullité absolue - d'une décision d'une chambre de recours de l'OEB pour vice fondamental de procédure est déjà possible de lege lata. En effet, le devoir des chambres de recours d'appliquer les principes généraux du droit fournit la base légale à la procédure de révision.
c) La chambre de recours juridique relève à juste titre que l'article 106(1) CBE n'institue aucun recours contre les décisions des chambres de recours mais elle poursuit en affirmant que les chambres de recours ne sont pas compétentes pour réexaminer leurs propres décisions. Toutefois, l'article 21(1) CBE, sur lequel la chambre juridique se fonde, n'exclut pas qu'une chambre de recours réexamine sa propre décision. Aucune disposition de la CBE ne l'exclut.
Au contraire, en cas de requête en restitutio in integrum, l'article 122(4) CBE comporte nécessairement la compétence pour les chambres de recours de constater la nullité de leur propre décision (cf. décision W 3/93 précitée). En outre, la règle 65 CBE prescrit que toute décision sur la recevabilité d'un recours selon l'article 106 CBE est de la compétence de la chambre de recours. En conséquence, même un recours dirigé contre une décision d'une chambre de recours doit faire l'objet de cet examen de recevabilité. Celui-ci n'est nullement dépourvu de raison d'être lorsque, comme en l'espèce, ETA invoque que la décision attaquée viole un principe fondamental de procédure. En outre, ETA fait valoir que la décision est, matériellement, une décision de première instance, la chambre ayant exercé les pouvoirs de la division d'opposition. Dès lors, sa décision est susceptible de recours.
d) S'il existe un intérêt général à donner une fin à tout litige, les justiciables ont un intérêt tout aussi important et légitime à une saine administration de la justice et au respect des principes fondamentaux de la procédure tels qu'ils sont admis aujourd'hui dans tout ordre juridique qui se respecte. L'un de ces principes majeurs est le droit d'être entendu, dont ETA invoque en l'espèce la violation. Selon ce principe, expressément ancré dans la CBE, les décisions de l'OEB ne peuvent être fondées que sur des motifs au sujet desquels les parties ont pu prendre position (article 113(1) CBE), ainsi qu'il résulte d'une jurisprudence constante et fournie des chambres de recours. L'exigence du droit d'être entendu s'applique à toutes les instances de l'OEB, y compris les juridictions du deuxième degré que sont les chambres de recours, qui ne sauraient bénéficier d'une sorte d'immunité à cet égard.
Selon ETA, il convient plutôt de considérer que, dans le système de la CBE, une procédure affectée d'un vice substantiel de procédure n'est pas véritablement terminée, malgré la décision de l'instance du second degré. Le juge n'a, dans ce cas, pas encore, ou pas valablement, purgé sa saisine et la procédure doit être réouverte. Dès lors il appartient à l'OEB - plus précisément à l'instance visée au paragraphe 2 de la règle 10 CBE (Praesidium), dans le cadre des compétences qui lui sont dévolues à la règle 11 CBE - de définir les règles de procédure permettant de constater l'existence d'une violation alléguée d'un principe fondamental de procédure et, si cette violation est constatée, de rouvrir la procédure pour remédier à cette violation.
Parmi les décisions citées par la chambre juridique concernant la maxime "res iudicata" il y a lieu de relever que dans les décisions T 79/89 et T 843/91, des vices de procédure allégués concernant une décision antérieure d'une chambre de recours rendue dans la même affaire ont effectivement été examinés.
De plus, dans l'affaire T 167/93, il résulte d'un passage au point 2.7 des motifs que rien dans la CBE ne s'oppose à l'examen d'une même cause à deux reprises par une chambre de recours, en l'occurrence par l'effet d'une opposition formée après la procédure d'examen de brevet.
e) Les chambres de recours étant la seconde et dernière instance judiciaire de l'OEB et, à ce titre, le gardien suprême de la CBE, cette situation constitue un autre motif qui milite en faveur du pouvoir des chambres de recours de l'OEB de réexaminer leurs propres décisions sur requête d'une partie alléguant la violation d'un principe fondamental de procédure. Le vide créé par la suppression d'une Cour de Cassation dans le système de brevets européens doit être comblé de cette manière.
f) La chambre de recours juridique relève la possibilité de remettre en cause une décision ayant acquis force de chose jugée par d'éventuelles voies de recours extraordinaires. Il résulte d'une étude détaillée de l'Institut suisse de droit comparé à Lausanne, auquel ETA s'est adressée dans le cadre d'une éventuelle application de l'article 125 CBE, et du tableau comparatif résumant les principales caractéristiques des procédures identifiées par ledit Institut, que tous les Etats contractants examinés, notamment l'Allemagne, la Belgique, l'Espagne, la France, l'Italie, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et la Suisse connaissent une procédure de révision de décisions judiciaires définitives et exécutoires entachées d'un grave vice de procédure, soit pour violation de règles fondamentales de l'organisation judiciaire ou de la procédure, telles que la composition irrégulière du Tribunal, la participation à la décision d'un juge non habilité ou d'un tiers non autorisé, ou encore l'omission de statuer sur certaines conclusions des parties, etc., soit suite à la disparition des bases d'une décision, notamment la découverte de pièces décisives après le prononcé du jugement ou l'existence de fausses pièces ou de faux témoignages ayant pesé dans la décision.
D'autre part, tous les Etats contractants examinés connaissent une procédure de cassation de décisions judiciaires de deuxième instance pour violation de principes fondamentaux de la procédure, en matière civile et (sauf pour l'Italie) administrative. De plus, certains Etats contractants offrent une protection spécifique sous la forme d'un recours du type constitutionnel contre des décisions de dernière instance pour violation de leur droits fondamentaux, dont le droit d'être entendu (Allemagne, Espagne, Suisse).
g) Les principes fondamentaux de procédure en question ne sont pas seulement ceux de la CBE. L'interprétation de la CBE par les chambres de recours ou la Grande Chambre de recours a permis à de nombreuses reprises d'en compléter ou d'en préciser les dispositions. En outre, si l'interprétation de la CBE ne fournit pas de solution, les instances de l'OEB doivent prendre en considération les principes de procédure généralement admis dans les Etats contractants (article 125 CBE).
L'analyse comparative de la législation de huit Etats contractants permet de constater que si les cas d'ouverture à révision selon le modèle continental sont généralement limitativement énumérés, la formule retenue pour le pourvoi en cassation ou le recours de type constitutionnel est souple et embrasse la violation de toutes les règles fondamentales de procédure. En matière de révision, la modification de la loi suisse en 1991 étend même potentiellement les possibilités de révision à toutes les violations des règles d'un procès équitable au sens de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH) tandis qu'au Royaume-Uni la révision permet d'attaquer toute irrégularité de procédure.
h) La CBE connaît aussi une notion analogue à la violation d'un principe fondamental de procédure, à savoir le vice substantiel de procédure, énoncé à la règle 67 CBE. Selon ETA les principes fondamentaux de procédure inscrits dans la CBE comprennent également la garantie du double degré de juridiction, aussi bien au stade de l'examen d'une demande de brevet que lors de la procédure d'opposition. Sur ce point, il existe une jurisprudence abondante des chambres de recours qui démontre que l'admission d'un recours a pour conséquence, en principe, le renvoi de l'affaire devant la division du premier degré, afin que les parties conservent leur droit de faire un recours. Ce n'est que dans des cas exceptionnels, notamment lorsque la perte d'une instance ne va pas à l'encontre de l'équité ou que le requérant a expressément renoncé au droit qui lui revient de faire appel à deux instances, que la chambre de recours statue elle-même conformément à l'article 111(1) CBE ("La jurisprudence des chambres de recours de l'OEB", 1996, p. 386 ch. 8).
i) Quant à la pratique des fins de non-recevoir administratives telles qu'elles ont été appliquées jusqu'ici, celle-ci ne trouve aucune base légale dans la CBE et constitue une grave anomalie dans le fonctionnement de l'OEB. Les chambres de recours doivent être souveraines dans l'exercice de leurs compétences et il n'est pas admissible que les agents de l'OEB prennent des mesures à caractère administratif qui les empêcheraient de statuer.
X. En date du 13 juillet 1998 une ordonnance a été rendue par laquelle il a été décidé de faire participer les opposants dans l'affaire T 456/90 comme parties intervenantes à la procédure G 1/97. Elles ont été invitées à présenter leurs observations éventuelles dans un délai de deux mois.
L'opposant Piranha Marketing GmbH n'a pas pris position, tandis que l'opposant Junghans Uhren GmbH a fait parvenir ses observations par lettre du 2 septembre 1998. Tout en estimant que les décisions des chambres de recours passées en force de chose jugée ne devraient en principe pas pouvoir être remises en cause, ladite partie intervenante n'a pas exclu l'idée de pouvoir corriger de telles décisions, affectées d'une grave violation de procédure, pour autant qu'une telle procédure n'ait pas d'effet suspensif.
XI. En date du 26 août 1998 le Président de l'OEB a pris position conformément à l'article 11bis du Règlement de Procédure de la Grande Chambre de recours.
Cette prise de position peut être résumée ainsi qu'il suit :
a) La CBE ne prévoit pas de procédure de révision des décisions des chambres de recours (article 106(1) CBE) qui, dès leur prononcé, acquièrent donc force de chose jugée. Seule la règle 89 CBE peut être appliquée qui n'autorise que la correction de fautes d'expression, de transcription et des erreurs manifestes dans les décisions, et non la correction d'erreurs de droit.
b) D'autre part, l'application de l'article 125 CBE est exclue. D'après les travaux préparatoires et en particulier les remarques du 15 novembre 1961 de K. Haertel (Bemerkungen zu dem ersten Arbeitsentwurf eines Abkommens über ein europäisches Patentrecht, Artikel 155 bis 170, pages 48 et s.) ainsi que le libellé de l'article 125 CBE, cette disposition vise exclusivement à combler des lacunes dans les procédures instituées par la CBE, c'est-à-dire les procédures déjà prévues dans la CBE. Le législateur n'a en effet pas voulu habiliter l'OEB à créer lui-même un droit procédural complémentaire. D'autre part, la compétence conférée au Praesidium par l'article 23(4) CBE ne va pas jusqu'à l'habiliter à créer une voie de recours entièrement nouvelle.
c) - Il convient donc de donner des suites administratives aux requêtes en révision d'une décision passée en force de chose jugée, ce qui relève de la compétence de la Direction Générale responsable des chambres de recours.
d) Quant à la deuxième question soumise à la Grande Chambre, les décisions des chambres de recours n'étant pas susceptibles de révision et ne pouvant donc plus être annulées, il n'est pas nécessaire de prévoir une inscription au Registre européen des brevets. En conséquence, seules peuvent être inscrites audit Registre les mentions visées à la règle 92(1) CBE et celles citées dans les communiqués du Président de l'OEB conformément à la règle 92(2) CBE.
XII. La partie intervenante Junghans Uhren GmbH a fait savoir qu'elle partageait l'avis du Président de l'OEB.
XIII. Dans ses observations complémentaires du 18 novembre 1998 en réponse à l'avis du Président de l'OEB, ETA a exposé encore ce qui suit :
a) En ce qui concerne la règle 89 CBE, son texte n'interdit nullement d'inclure dans la notion d'erreur manifeste une violation des règles de procédure. La jurisprudence des chambres de recours a interprété de manière assez large la notion d'erreur. Dans la décision J 12/85 (point 3 des motifs), il a été admis que des incohérences relevées dans une décision de délivrance d'un brevet peuvent justifier le dépôt d'une requête en rectification en application de la règle 89 CBE (cf. également la décision T 105/89 du 30 octobre 1990, où il a été admis que la rectification selon la règle 89 CBE permettait également de corriger un grave vice de forme (point 1.2 des motifs). Dans la décision T 770/95 du 15 septembre 1997, la chambre de recours a considéré que "la règle 89 CBE ne fait pas de distinction selon l'origine des fautes ou erreurs" (point 2.1 des motifs). Selon la même décision, dès lors qu'une erreur est reconnue comme manifeste, toute rectification qui y porte remède est acceptable si elle respecte les stipulations de la convention (point 4 des motifs). La chambre de recours a encore souligné qu'"une rectification d'erreur rétablit les choses en l'état qui aurait toujours dû être le leur" (point 5 des motifs).
b) En ce qui concerne l'article 125 CBE, la question de savoir si une nouvelle procédure, non prévue par la CBE, peut être créée, ne se pose pas, puisqu'ETA a saisi la chambre de recours technique de requêtes qui s'inscrivent dans le cadre de procédures prévues par la CBE : recours (article 106 et règle 65 CBE), demande de restitutio in integrum (article 122 CBE), requête en rectification d'erreurs (règle 89 CBE) et reprise de procédure (basée par ETA sur l'article 114 CBE). C'est dans ce contexte bien défini que les instances de l'OEB peuvent s'appuyer sur les principes auxquels renvoie l'article 125 CBE.
Il est donc erroné de prétendre que la question posée à la Grande Chambre tend à la création, par le truchement de l'article 125 CBE, de voies de recours qui n'existent pas dans la CBE.
c) Quant aux organes administratifs, ils n'ont aucun pouvoir pour trancher les différends de nature juridictionnelle entre les parties. Ces différends doivent être tranchés par les instances chargées des procédures qui sont visées à l'article 15 CBE (sauf les divisions de recherche). Lorsque les chambres de recours sont saisies de requêtes qui s'inscrivent dans le cadre de procédures prévues par la CBE, elles ont l'obligation de statuer, ce qui n'exclut pas une décision constatant l'irrecevabilité d'une requête. La pratique administrative suivie jusqu'à présent viole aussi le principe de la confiance légitime (cf. G 5/88, JO OEB 1991, p. 137, 153) de même que le droit à un procès équitable consacré par l'article 6, 1 CEDH.
d) En ce qui concerne l'inscription au Registre européen des brevets, il résulte du communiqué du Président de l'OEB du 22 janvier 1986 (JO OEB 1986, p. 61) que la date de réception d'une requête de restitutio in integrum doit être inscrite dans ledit Registre. C'est précisément ce que ETA sollicite par sa requête du 11 novembre 1992.
e) ETA invoque aussi le principe de la garantie du double degré de juridiction en matière de révocation de brevet, consacré par l'article 32 de l'Accord du 15 avril 1994 sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC ; en anglais TRIPs) en ajoutant à son mémoire un article de B. Cronin "Is the EPO Practice Compatible with Provisions of the TRIPS Agreement ?" EPI Information 3/1994. Ainsi elle conteste, comme le fait l'article et comme elle l'élabore dans un mémoire ultérieur, la compatibilité de la pratique de l'OEB avec l'article 32 ADPIC.
XIV. En réponse à la communication de la Grande Chambre de recours du 22 février 1999, jointe à la convocation à la procédure orale du 11 mai 1999, ETA a encore envoyé des observations en date du 12 avril 1999 dont le contenu, dans la mesure où il contient de nouveaux éléments, peut être résumé ainsi qu'il suit :
a) Si la Grande Chambre était d'avis que, pour répondre à la question qui lui est posée sur la révision, une nouvelle procédure non prévue dans la CBE devait être définie, l'article 125 CBE fournirait également une base légale suffisante puisque cette disposition est conçue pour combler les lacunes de la CBE en matière de procédure.
b) Quant aux voies de droit existant dans les Etats contractants de la CBE, il y a lieu d'observer également que la pratique des Etats contractants offre plusieurs exemples de création, par voie prétorienne, de procédures permettant de remédier à un vice substantiel de procédure (Belgique, Italie, Royaume-Uni, Suisse). En ce qui concerne la notion de violation d'un principe fondamental de procédure, il convient de tenir compte des principes expressément prescrits par la CBE (par ex. aux articles 23(3), 110(2), 113(1)(2), 116 et à la règle 66(2) CBE), des principes énoncés par la jurisprudence des chambres de recours et des principes généralement admis dans les Etats contractants au sens de l'article 125 CBE.
c) Quant à l'ADPIC, l'éventuelle inapplicabilité de son article 32 au cas d'espèce pour des motifs de droit transitoire, ne saurait en aucun cas empêcher la révision de la décision de la Chambre de recours technique du 25 novembre 1991, puisque toutes les requêtes de ETA ne sont pas fondées sur cet article mais sur les règles de la CBE, sur ses dispositions d'application et sur les principes de droit généralement admis dans les Etats contractants de la CBE.
Toutefois, le caractère impératif de l'article 32 ADPIC, qui énonce une exigence fondamentale du droit des brevets plaide en faveur d'une application de cette disposition à toutes les procédures en cours et non pas aux seules procédures engagées après le 1er janvier 1995, date d'entrée en vigueur de l'ADPIC.
Sans doute la question de l'effet direct des dispositions de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) et aujourd'hui de l'accord ADPIC n'a-t-elle pas de réponse univoque mais les organes et instances de l'OEB n'ont jamais affirmé que l'article 32 ADPIC pouvait être ignoré. Au contraire, l'opinion qui a prévalu jusqu'à ce jour est que les dispositions de procédure de la CBE respectent l'article 32 ADPIC et que cette mesure n'appelle pas de modifications des règles ou de la pratique de l'OEB en matière de révocation des brevets. Toutefois, la règle énoncée à l'article 32 ADPIC n'est pas respectée lorsque la révocation d'un brevet européen survient pour la première fois par décision d'une chambre de recours exerçant les compétences de la division d'opposition et que cette décision est de surcroît affectée d'un vice substantiel de procédure.
D'autre part, à supposer que l'article 62(5) ADPIC s'applique aux procédures devant l'OEB, il n'entrerait pas en conflit avec l'article 32 ADPIC. En effet, le texte clair dudit article 62(5) ADPIC désigne les décisions d'instances administratives et concerne par ailleurs les procédures relatives à tous les droits de la propriété industrielle. En revanche, l'article 32 ADPIC concerne spécifiquement les brevets ; la règle qu'il énonce ne s'applique pas seulement aux décisions administratives.
d) Pour ce qui concerne la deuxième question posée à la Grande Chambre de recours, l'inscription des décisions relatives à l'opposition est prévue à la règle 92 (1)(r) CBE. En cas de recours contre une décision de révocation prononcée par une chambre de recours, il y a lieu de supprimer la mention de la décision de révocation ou d'accompagner celle-ci de la mention du dépôt de recours jusqu'à ce qu'une décision intervienne sur la recevabilité dudit recours.
Comme le public doit être informé le plus rapidement possible de la situation juridique, la mention au Registre européen des brevets doit être effectuée dès le dépôt d'une requête tendant à la révision d'une décision d'une chambre de recours.
e) Les suites juridictionnelles à donner aux requêtes de ETA devraient prévaloir pour toute autre requête analogue éventuellement pendante. En effet, il est généralement admis qu'une modification des règles de procédure - du moins lorsqu'elle se produit en faveur du justiciable - porte également sur les procédures en cours (cf. G 4/97). En ce qui concerne les procédures définitivement closes, il n'y a en principe pas lieu de donner un effet rétroactif à un changement de jurisprudence.
XV. Dans le cadre de l'article 11ter du Règlement de procédure de la Grande Chambre de recours, plusieurs observations de tiers ont été déposées.
XVI. Lors de la procédure orale, à laquelle les parties intervenantes n'ont pas participé, ETA a essentiellement développé les arguments qu'elle avait exposés par écrit.
Elle a cité également la décision T 460/95, la décision du 17 décembre 1998 de la Chambre des lords du Royaume-Uni dans l'affaire Pinochet et une décision du 18 mars 1987 du Tribunal fédéral suisse (ATF 113 Ia 146). Quant aux suites requises par elle dans le cadre de la première question, elle a exposé que la décision de la Grande Chambre de recours devrait au moins avoir un effet ex tunc à partir de la date des requêtes en révision qui, comme les siennes, ont été poursuivies activement.
A la fin de la procédure orale, le Président de la Grande Chambre de recours a annoncé que la décision serait prise par écrit.
Motifs de la décision
1. Dans sa décision du 28 février 1997, la Chambre juridique constate que toutes les requêtes présentées par ETA à la suite de la décision T 456/90 de la chambre de recours technique 3.5.2 tendent à obtenir la révision de cette décision passée en force de chose jugée, indépendamment de la qualification qui leur a été attribuée par ETA. Dans le libellé de sa première question, la chambre juridique les qualifie de requêtes fondées sur la violation alléguée d'un principe fondamental de procédure.
Se basant sur cette qualification, la chambre juridique pose la question des suites qu'il convient de réserver à de telles requêtes. Pour pouvoir répondre à cette question, la Grande Chambre de recours estime d'abord nécessaire d'examiner si dans le cadre de la CBE ces requêtes, qui tendent à obtenir la révision de décisions des chambres de recours passées en force de chose jugée et qui se fondent sur la violation alléguée d'un principe fondamental de procédure, peuvent être valablement présentées, les suites étant évidemment différentes selon que la réponse est affirmative ou négative.
2. Tout d'abord il convient donc d'examiner si les moyens, tels que prévus dans le texte de la CBE et utilisés par ETA, se prêtent à de telles requêtes.
a) En ce qui concerne le recours, l'article 106(1) CBE lui confère un effet suspensif. Cet effet empêche qu'une décision acquière force de chose jugée (formelle) et ne peut donc être rattaché qu'à des moyens de recours ordinaires, c'est-à-dire dirigés contre des décisions qui ne sont pas encore passées en force de chose jugée (Rosenberg/Schwab/Gottwald, Zivilprozessrecht, 15ème édition, pages 800-801 ; Habscheid, Schweizerisches Zivilprozess- und Gerichtsorganisationsrecht, 2ème édition, n° 702 ; Droit pratique de la procédure civile, Dalloz Action, 1998, par. 5063). Puisque, comme la chambre juridique l'a correctement exposé dans sa décision, les décisions des chambres de recours acquièrent force de chose jugée dès qu'elles sont rendues, un recours selon l'article 106 CBE contre ces décisions est exclu. Ceci est d'ailleurs confirmé par les articles 21 et 106 CBE, qui ne mentionnent pas les chambres de recours parmi les instances qui rendent des décisions susceptibles de recours, l'énumération dans ces articles devant donc être considérée comme exhaustive.
En se basant sur l'article 111 CBE, ETA fait valoir qu'en révoquant un brevet pour la première fois, une chambre de recours agit comme première instance, c'est-à-dire comme division d'opposition, ce qui ouvre la voie du recours contre sa décision. Cependant, cet article traite d'une part de l'effet de "réformation" et d'autre part de l'effet que certains auteurs appellent l'effet de "cassation" d'un moyen de recours (cf. Habscheid, Droit judiciaire privé suisse, deuxième édition, p. 473). Suite au premier effet, une chambre de recours statue elle-même quant au fond, tandis que sous l'empire du second effet cette instance renvoie l'affaire à la première instance pour suite à donner. L'article 111 CBE ouvre aux chambres de recours les deux possibilités, comme le font d'ailleurs nombre de moyens de recours dans les Etats contractants de l'OEB (p.ex. en Suisse l'article 64 de la loi fédérale d'organisation judiciaire pour le recours en réforme au Tribunal fédéral, au Royaume-Uni la règle 7(5) R.S.C. Ord. 55). Ces effets concernent uniquement le choix dont dispose une chambre en cas de recours. Dans le cas de l'effet de "réformation", sa décision ne peut être assimilée à une décision de première instance. Dans ce contexte, c'est à tort que ETA a exposé que, selon une jurisprudence abondante des chambres de recours, l'admission d'un recours donnait lieu, en principe, au renvoi de l'affaire devant la juridiction du premier degré afin que les parties conservent leur droit au recours. Conformément à l'article 111(1) CBE, il appartient aux chambres de recours de procéder ou de ne pas procéder à un renvoi selon les circonstances propres à chaque affaire, ainsi qu'il résulte de la jurisprudence citée dans "La Jurisprudence des chambres de recours de l'Office européen des brevets" (3ème éd. 1998, pages 549-551). Selon l'article 10 du Règlement de procédure des chambres de recours, même lorsque la procédure de première instance est entachée de vices majeurs, les chambres de recours peuvent décider de ne pas renvoyer l'affaire à cette instance au cas où des raisons particulières s'y opposent. Ce pouvoir de libre appréciation quant à un renvoi éventuel vaut également lorsqu'une chambre envisage de révoquer un brevet suite au recours d'un opposant (cf. T 557/94, non publiée au JO OEB, point 1.3. des motifs, deuxième paragraphe, troisième phrase).
b) ETA a également déposé une requête en restitutio in integrum selon l'article 122 CBE. Selon elle, cet article contient au moins le mécanisme d'une requête en révision pour violation d'un principe fondamental de procédure puisque son application peut rendre caduque une décision entreprise, ainsi qu'il a été décidé dans l'affaire W 3/93 (JO OEB 1994, 931).
Cependant, l'article 122 CBE est étranger à la notion de requête en révision telle que l'a qualifiée la chambre juridique puisqu'une des conditions essentielles de cet article est de n'avoir pu observer un délai à l'égard de l'OEB, c'est à dire un délai imparti par l'OEB ou prévu par la Convention ou son Règlement d'exécution. Un délai "virtuel" tel que celui sur lequel ETA s'est fondée dans sa requête en restitutio in integrum du 16 janvier 1992 ne suffit pas. Même si une erreur de procédure avait entraîné un empêchement, tel qu'il est prévu à l'article 122 CBE, encore faudrait-il que toutes les conditions de la requête en restitutio in integrum, et notamment la non-observation d'un véritable délai, soient remplies. Une telle requête ne se prête donc pas à un recours contre une décision des chambres de recours pour violation d'un principe fondamental de procédure.
Il en va de même pour les requêtes en poursuite de la procédure selon l'article 121 CBE.
c) Dans la mesure où ETA a également prétendu qu'une action en révision était possible conformément à la règle 89 CBE, une violation fondamentale de procédure constituant une erreur manifeste, il y a lieu d'observer qu'une erreur de droit, qu'elle ait trait au fond ou à la procédure, ne peut être corrigée dans le sens de ladite règle. Les décisions que ETA a citées à cet égard manquent de pertinence (cf. T 105/89 du 30 octobre 1990 (non publiée au JO OEB) concernant un cas où le dispositif contredit la motivation ; T 770/95 du 15 septembre 1997 (non publiée au JO OEB) concernant la correction du texte d'un brevet accordé par une décision antérieure, ce texte étant considéré comme faisant partie de ladite décision, et ce en vue du remplacement d'expressions techniques erronées n'ayant aucune signification pour l'homme du métier dans le contexte spécifique). Ces deux exemples illustrent ce qui doit être entendu par des "incohérences" qui peuvent être corrigées selon la règle 89 CBE, ainsi qu'il a été décidé dans l'affaire J 12/85 (JO OEB 1986, 155) citée également par ETA.
d) En ce qui concerne la requête en "poursuite de la procédure" sur la base de l'article 114(1) CBE, déposée par ETA également le 16 janvier 1992, il est évident que cet article, qui ne fait qu'énoncer le principe de l'examen d'office, ne peut pas entrer en ligne de compte comme fondement de requêtes telles que qualifiées par la chambre juridique dans sa première question.
e) Au soutien de sa thèse selon laquelle les requêtes en révision doivent nécessairement être traitées dans le cadre des institutions existantes dans la CBE, ETA invoque que le législateur avait initialement prévu une Cour européenne des brevets qui aurait eu notamment pour tâche d'examiner les cas de violation de règles fondamentales de procédure. La Grande Chambre de recours ne partage pas cette opinion. Ni la CBE ni les travaux préparatoires ne permettent de conclure que, suite à l'abandon de l'idée d'une Cour européenne des brevets, les requêtes en révision pour violation de règles fondamentales de procédure soient à traiter dans le cadre des institutions existantes. Bien au contraire: le législateur ayant finalement décidé, après avoir abandonné l'idée de la Cour européenne, de créer la Grande Chambre de recours qui devait suffire comme instance régulatrice, il est inconcevable qu'il ait eu l'intention de pallier cette situation en conférant aux chambres de recours une compétence dont aurait disposé ladite instance supérieure.
C'est également à tort qu'ETA prétend qu'une chambre de recours, ayant rendu une décision finale, n'aurait pas purgé sa saisine lorsque cette décision est affectée d'une violation d'un principe fondamental de procédure. En effet, en tranchant un litige, elle est dessaisie de l'affaire qui lui avait été soumise.
Quant à l'affaire T 460/95 (JO OEB 1998, 587, point 2 des motifs) à laquelle ETA s'est référée à cet égard, elle ne concerne qu'une décision intermédiaire, dans laquelle une seule question de recevabilité avait été examinée.
En outre, ETA a relevé que des arguments ayant trait à des vices de procédure à l'encontre d'une décision de renvoi antérieure ont bien été examinés par des chambres de recours.
En ce qui concerne la décision T 79/89 (JO OEB 1992, 283) et les deux décisions T 843/91 (JO OEB 1994, 818 et 832), citées par ETA à cet égard, il y a cependant tout d'abord lieu d'observer que ces arguments avaient été soulevés dans le cadre d'un nouveau recours recevable.
De plus, si dans l'affaire ex parte T 79/89, la chambre de recours a examiné les griefs du requérant concernant la violation de son droit d'être entendu lors de la procédure de recours antérieure, elle semble l'avoir fait surabondamment, non seulement parce que ces griefs lui paraissaient clairement non fondés (point 2.3. des motifs) mais aussi pour expliquer que, même si ces griefs avaient été formulés en temps voulu, c'est-à-dire avant que la chambre ne rende sa décision antérieure, elle les aurait rejetés (point 4.2. des motifs).
Quant à l'affaire inter partes T 843/91, suite à la récusation des trois membres de la chambre de recours qui avaient pris part à la décision de renvoi antérieure, la chambre autrement composée a rendu une décision intermédiaire dans laquelle elle a bien évidemment dû examiner les motifs de récusation, parmi lesquels figurait celui tiré de la violation du droit d'être entendu lors de la procédure de recours antérieure. La requête en récusation ayant été rejetée, c'est à bon droit que, dans la décision définitive, la chambre a repris la motivation de la décision intermédiaire. Par ailleurs, dans la première décision T 843/91 (point 6 des motifs), la chambre rappelle qu'une décision des chambres de recours ne peut être contestée que lorsque les règles statutaires le prévoient expressément et que rien, dans la Convention sur le brevet européen, ne permet de se pourvoir contre une telle décision. La deuxième décision T 843/91 a statué dans le même sens (point 4 des motifs).
Quant à l'affaire T 167/93 (JO OEB 1997, 229), que ETA a également invoquée, il y a été uniquement décidé que, dans une procédure d'opposition ou lors d'une procédure de recours engagée sur cette opposition, l'instance compétente n'est pas liée par une décision rendue par une chambre de recours à la suite d'un recours formé contre une décision de la division d'examen.
Ces décisions, rendues dans des circonstances particulières, ne permettent donc pas de conclure que la jurisprudence ait admis la possibilité d'entreprendre les décisions des chambres de recours pour violation d'un principe fondamental de procédure.
f) Il résulte de ce qui précède que les moyens invoqués par ETA ne justifient pas le dépôt valable de requêtes telles qu'elles ont été qualifiées par la chambre juridique, c'est-à-dire de requêtes fondées sur la violation alléguée d'un principe fondamental de procédure et qui tendent à la révision d'une décision passée en force de chose jugée. La Grande Chambre de recours ne voit pas non plus d'autres moyens expressément prévus dans la CBE qui pourraient servir de base à de telles requêtes. Une observation d'un tiers cite la règle 90 CBE dans le cas où une décision aurait été rendue par une chambre de recours à l'insu d'un motif d'interruption de procédure. Cependant, il s'agit là d'un cas très spécifique, au sujet duquel ETA a fait remarquer à juste titre qu'il ne s'agissait pas d'une violation d'un principe fondamental de procédure mais plutôt d'une irrégularité due à un fait extérieur à la procédure, étrangère à l'objet de la première question posée par la chambre juridique.
Force est donc de constater que les textes de la CBE ne prévoient pas de requêtes telles que qualifiées par la chambre juridique.
3. Au point 9 des motifs de sa décision du 28 février 1997, la chambre juridique mentionne des voies de recours spécifiques, qui sont instituées par la législation de nombreux pays et qui permettent d'entreprendre des jugements passés en force de chose jugée pour irrégularité, par exemple pour violation d'un principe fondamental de procédure. ETA fait également état de ces voies dans ses écrits. A cet égard elle a versé au dossier une étude comparative de l'Institut suisse de droit comparé sur les voies de droit permettant d'entreprendre une décision judiciaire pour violation d'un vice grave de procédure, dans laquelle est examinée la situation dans huit Etats contractants de la CBE. Il en résulte que tous ces Etats connaissent de telles voies spécifiques et il est fort probable qu'il en soit de même dans la plupart des autres Etats contractants. Dès lors, comme la CBE ne contient pas de telles voies, la question se pose de savoir si elles ne pourraient pas être introduites sur la base de l'article 125 CBE. Cette possibilité a bien été visée par la chambre juridique par les mots "Dans le cadre de la CBE", cet article faisant bien évidemment partie de la CBE.
a) Sous le titre "Référence aux principes généraux", l'article 125 CBE dispose : "En l'absence d'une disposition de procédure dans la présente convention, l'Office européen des brevets prend en considération les principes généralement admis en la matière dans les Etats contractants." Bien qu'ETA veuille voir appliquer à titre principal l'article 125 CBE aux procédures existantes, voire aux moyens utilisés par elle, elle soutient aussi que cet article fournit une base suffisante pour créer une voie spécifique, cette disposition étant conçue pour combler les lacunes de la CBE.
En ce qui concerne l'interprétation de cet article, il y a tout d'abord lieu d'observer qu'il ne fait pas référence à l'absence d'une procédure mais uniquement à celle d'une disposition de procédure. D'autre part, il n'y est pas question de prise en considération de procédures, mais de "principes" de procédure généralement admis dans les Etats contractants.
Or, la création d'une voie spécifique, telle qu'elle existe dans les Etats contractants, dépasse amplement la faculté de remédier à l'absence d'une simple disposition procédurale par un principe de procédure, tel que p.ex. le principe de l'égalité des droits des parties. En effet, ce qui serait introduit ne serait pas un principe, mais une nouvelle institution de procédure, c'est-à-dire un nouveau moyen de recours au sens large du terme. Dès lors, il ne suffirait pas de dire que les décisions des chambres de recours peuvent être entreprises pour des irrégularités procédurales. Il faudrait aussi définir quelles irrégularités entrent en ligne de compte ainsi que les autres modalités liées à un moyen de recours au sens large, comme p.ex. l'instance compétente pour statuer, les délais à respecter, les moyens pour sauvegarder les droits des tiers, les taxes, etc.
Les travaux préparatoires auxquels le Président de l'OEB s'est référé (cf. supra sous XI, b) illustrent que le législateur a été surtout préoccupé du caractère nécessairement incomplet du Règlement d'exécution (page 48). Sans doute y est-il aussi question de lacunes dans la Convention (page 50 in fine, page 51, ligne 6), mais les mots "ergänzendes Verfahrensrecht" figurant aux lignes 17 et 23 de la page 50 et la référence aux principes généraux de procédure au premier paragraphe de la page 51 soulignent le caractère uniquement complémentaire du droit de procédure visé.
Dès lors il faut considérer que l'article 125 CBE ne fournit qu'un moyen de compléter les procédures existantes en cas de lacune d'une disposition de la CBE. Cela ressort d'ailleurs de la jurisprudence des chambres de recours, entre autres - pour ne citer que quelques décisions se référant explicitement à l'article 125 CBE - de la décision T 905/90 (JO OEB 1994, 306, point 5 des motifs) concernant le principe de bonne foi, de la décision T 669/90 (JO OEB 1992, 739, points 2.3 et 2.4 des motifs) concernant le principe du contradictoire et de la décision T 73/88 (JO OEB 1992, 557, point 1.2 des motifs) concernant le principe de l'égalité des parties.
En ce qui concerne l'affaire G 1/86 (JO OEB 1987, 447), dans laquelle il a été décidé qu'un requérant, qui est également opposant, peut être restauré dans ses droits au titre de l'article 122 CBE s'il n'a pas déposé dans les délais le mémoire exposant les motifs de recours, c'est à tort que ETA considère qu'une nouvelle procédure y a été introduite. En effet, cette décision reste ancrée dans le cadre de l'article 122 CBE et repose essentiellement sur la considération de la Grande Chambre de recours selon laquelle ni les travaux préparatoires de la Convention, ni le fondement de l'article 122 CBE ne faisaient obstacle à ce que puisse être admise la possibilité pour l'opposant de se prévaloir de cet article dans le cadre d'une procédure de recours déjà valablement engagée, cette considération étant d'autre part complétée par le principe selon lequel les parties à une procédure engagée devant une instance judiciaire doivent jouir des mêmes droits procéduraux. En donnant son sens à l'article 122 CBE, la Grande Chambre de recours n'instituait pas de nouvelle procédure.
b) Dans un système de codification, tel que celui de la CBE, le juge ne peut se substituer, au fur et à mesure des besoins, au législateur qui demeure la première source du droit. Certes, il peut être amené à combler des lacunes, en particulier quand il s'avère que le législateur a omis de régler certaines situations. Il peut même contribuer à l'évolution du droit au delà des lacunes. Toutefois, en principe, la loi doit lui donner, ne serait-ce que de façon incomplète, des repères (cf. Palandt/Heinrichs, Bürgerliches Gesetzbuch, 58ème édition, Introduction, n° 46-49). Or, comme il a été indiqué (cf. supra sous 2), en l'espèce le législateur voulait créer une Cour européenne des brevets, laquelle aurait eu la possibilité de statuer sur les irrégularités procédurales. Mais cette idée a été abandonnée en faveur de la Grande Chambre de recours telle qu'elle existe aujourd'hui, qui n'a pas le pouvoir d'examiner les cas de violations de règles fondamentales de procédure. "Corriger" cette situation en créant un moyen spécifique par le biais de l'article 125 CBE irait donc contre la volonté du législateur, volonté qui par la suite n'a été altérée ni par des accords ni par des pratiques au sens de l'article 31(3) de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités.
Dans les Etats contractants, les voies spécifiques permettant d'entreprendre les décisions judiciaires pour irrégularité sont dans une vaste majorité prévues par la loi. Il est vrai que, dans quelques cas, ces voies ont été créées par voie prétorienne. Cependant, par exemple, dans le cas ATF 118 II 199, cité par ETA, le Tribunal fédéral suisse a, par analogie, appliqué la révision selon l'article 137 de la loi fédérale d'organisation judiciaire aux sentences arbitrales (cf. aussi ATF 115 Ib 55). Dans un arrêt antérieur, également cité par ETA, le même Tribunal a admis la reconsidération d'une décision sans base légale expresse en se référant à l'article 4 de la Constitution suisse (ATF 113 Ia 46). Mais là aussi le Tribunal s'est inspiré des motifs de révision prévus à l'article 66 de la loi fédérale sur la procédure administrative et l'article 137 de la loi fédérale d'organisation judiciaire.
Par contre, une telle possibilité de procéder par voie d'analogie fait défaut dans le cadre de la CBE, celle-ci ne connaissant pas d'institution analogue, hormis l'article 23 du Règlement en matière de discipline des mandataires agréés, qui cependant est une règlementation tout à fait spécifique et ne fait pas partie des règles de procédure proprement dites de la CBE. Dans un autre cas, cité par ETA en provenance du Royaume-Uni, la Chambre des lords a admis, sans base législative expresse, de revoir une de ses propres décisions (décision du 17 décembre 1998 "In re Pinochet", [1999], I All ER, 577, cf. p. 585, j). Pour ce faire, elle a invoqué sa compétence intrinsèque ("inherent jurisdiction"). Il est à noter que cette décision a été prise dans un Etat où la voie prétorienne, comme source du droit, a une autre portée que dans les pays sous le régime du système de codification, un système auquel a souscrit la CBE (cf. Bergel, Méthodes du droit, Théorie générale du droit, 2ème éd., n° 50).
L'absence de possibilité de procéder par voie d'analogie dans le cadre de la CBE signifie aussi que la Grande Chambre de recours devrait fixer elle-même toutes les modalités de la voie spécifique qu'elle aurait créée. Elle devrait tout d'abord définir les cas de violations de principes fondamentaux de procédure qui pourraient entraîner l'annulation d'une décision des chambres de recours. Les solutions nationales n'apporteraient pas une grande aide, car, comme le démontre l'étude de l'Institut suisse de droit comparé présentée par ETA, elles sont d'une grande disparité, les motifs d'annulation allant de la découverte de faits nouveaux jusqu'à toute violation de règles de procédure. Ceci illustre d'ailleurs la nature éminemment politique de ce choix, car il s'agit de trouver un juste équilibre entre, d'une part, le souci de ne pas laisser subsister de décisions entachées de graves fautes procédurales et, d'autre part, la sécurité juridique et le souci de voir tout litige prendre fin dans un délai raisonnable. Or ce choix s'effectue dans de meilleures conditions dans le cadre d'une procédure législative ordinaire.
En ce qui concerne d'autres modalités telles que l'instance compétente pour statuer sur des violations de procédure ou les délais à respecter, il y a lieu d'observer que le droit procédural est un droit formel, qui doit permettre aux justiciables d'être parfaitement informés des conditions pour procéder en justice. Pour atteindre ce but, la voie législative est sans aucun doute également mieux appropriée que la voie prétorienne.
c) Il convient aussi de souligner combien il est important qu'en cas de révocation d'un brevet par une décision d'une chambre de recours passée en force de chose jugée, les tiers puissent exploiter l'objet du brevet révoqué en toute confiance à partir de la mention de cette révocation au registre européen des brevets sans avoir à craindre une injonction à ne pas exploiter ou d'être assigné en dommages et intérêts. Le législateur l'a prévu explicitement dans le cadre de la restitutio in integrum (article 122(6) CBE) et il paraît indispensable qu'en cas de procédure de révision une disposition analogue existe, que seuls les Etats contractants de l'OEB pourraient introduire.
Il résulte d'ailleurs des travaux préparatoires de la CBE concernant la règle 89 CBE que le législateur a été préoccupé par la protection des tiers. Cela ressort clairement de l'historique de cette règle, qui trouve sa source dans un projet d'article 159(a) (cf. BR/49 d/70, page 9) repris au projet de règlement d'exécution d'avril 1972 sous l'article 91(1) (cf. BR/185 d/72) dans lequel il est question de la rectification d'erreurs de procédure, pour autant que cela n'entraîne pas de préjudice entre autres pour les tiers. Finalement, seule la rédaction restrictive de la règle 89 CBE actuelle a été retenue, qui exclut toute possibilité de préjudice.
d) Pour les raisons ci-dessus mentionnées, la Grande Chambre de recours conclut donc qu'un moyen spécifique, tel qu'il a été mentionné par la chambre juridique et tel qu'il existe dans les Etats contractants et qui permettrait d'entreprendre les décisions des chambres de recours passées en force de chose jugée en raison d'une violation alléguée d'un principe fondamental de procédure, ne peut pas être créé par le biais de l'article 125 CBE.
4. Il reste donc à examiner la solution qui a été défendue par ETA tout au long de la procédure, c'est-à-dire l'application de l'article 125 CBE aux moyens prévus par la CBE aux fins de permettre, dans le cadre de ces moyens, un recours contre une décision finale des chambres de recours pour violation d'un principe fondamental de procédure.
Certes, une telle application de l'article 125 CBE ne se heurterait pas formellement à l'argument selon lequel cet article a été conçu pour compléter les procédures existantes (cf. supra sous 3). Cependant, un tel complément aboutirait en substance à donner aux moyens existants une nouvelle finalité qui n'est pas la leur et qui, en ce qui concerne les recours contre des décisions passées en force de chose jugée, relève dans les Etats contractants de voies spécifiques, c'est-à-dire de moyens de recours extraordinaires. Greffer sur les moyens existant dans la CBE, qui forment un système cohérent, cette finalité supplémentaire et étrangère à leur champ d'application spécifique, abolirait entièrement les frontières entre ces moyens. La preuve en est que, si l'on suivait le raisonnement de ETA, la CBE connaîtrait au moins quatre moyens (ceux présentés par ETA le 16 janvier 1992 devant la chambre de recours technique 3.5.2), par lesquels, au gré du requérant, une décision d'une chambre de recours passée en force de chose jugée pourrait être entreprise pour violation d'un principe fondamental de procédure. Cette situation n'irait pas seulement loin au-delà de ce qui est prévu dans les Etats contractants, mais créerait aussi de graves incertitudes, par exemple en ce qui concerne les délais pour présenter de telles requêtes, qui diffèrent selon les moyens existants (cf. les délais concernant le recours, article 108 CBE, et ceux pour présenter une requête en restitutio in integrum, article 122(2) CBE). De telles incertitudes sont incompatibles avec le droit procédural.
5. ETA expose aussi que la règle énoncée à l'article 32 ADPIC n'est pas respectée lorsque la révocation d'un brevet européen survient pour la première fois par décision d'une chambre de recours. Même si l'ADPIC n'est entré en vigueur que le 1er janvier 1995, donc bien après que les procédures en vue d'une révision ont été engagées par ETA, le caractère impératif de l'article 32 ADPIC, énonçant une exigence fondamentale du droit des brevets, plaide, selon ETA, en faveur d'une application de cette disposition à toutes les procédures en cours et non pas aux seules procédures engagées après le 1er janvier 1995.
a) Comme la décision de la chambre de recours 3.5.2 a été rendue plus de trois ans avant l'entrée en vigueur de l'ADPIC et que ETA l'a entreprise dans les deux mois qui l'ont suivie, il paraît fort douteux que l'ADPIC s'applique au cas d'espèce. Toutefois, cette question peut finalement rester ouverte, tout comme la question de l'effet direct de l'ADPIC, qui est controversée (cf. le jugement rendu par le "High Court of Justice" du Royaume-Uni du 20 décembre 1996 dans l'affaire Lenzing AG's European Patent (UK), [1997] R.P.C., 245, cf. p. 267 s.) et celle de son application dans le cadre de la CBE, l'OEB n'étant pas partie à l'ADPIC. Car même s'il fallait répondre de manière affirmative à ces trois questions, la Grande Chambre de recours arrive à la conclusion que la révocation d'un brevet européen survenant pour la première fois par décision d'une chambre de recours sans qu'il y ait possibilité de l'entreprendre ultérieurement, ne contrevient pas à l'ADPIC.
b) En effet, outre l'article 32 ADPIC, il y a lieu d'examiner une autre disposition de l'ADPIC, c'est-à-dire l'article 62(5). Cet article dispose que les décisions administratives finales dans les procédures relatives à l'acquisition ou au maintien des droits de propriété intellectuelle et, dans le cas où la législation d'un Membre prévoit de telles procédures, les procédures de révocation administrative et les procédures inter partes, telles que l'opposition, la révocation ou l'annulation, pourront faire l'objet d'une révision par une autorité judiciaire ou quasi judiciaire.
c) Le libellé de cette disposition couvre exactement la situation telle qu'elle se présente dans le cadre de la CBE et dans le présent contexte. Une décision administrative, émanant d'une division d'opposition de l'OEB, qui maintient un brevet, peut faire l'objet d'une révision, en l'espèce sur la base d'un recours, par une autorité judiciaire ou quasi judiciaire, en l'espèce une chambre de recours. Il y a lieu de noter que les chambres de recours peuvent être qualifiées d'autorités judiciaires, car elles réunissent tous les éléments d'une telle autorité : dans leurs décisions, les membres des chambres ne sont liés par aucune instruction et ne doivent se conformer qu'aux seules dispositions de la CBE (article 23(3) CBE) ; ils sont nommés pour une période fixe et ne peuvent être relevés de leur fonction pendant cette période sauf pour motifs graves (article 23(1) CBE) ; la CBE contient des dispositions pour la sauvegarde de l'impartialité des membres (article 24 CBE) ; les chambres comprennent toujours au moins un membre juriste (article 21 CBE) ; il existe des règles de procédure ; enfin, les chambres rendent des décisions écrites contenant les motifs (Règle 66(2) CBE). En ce qui concerne la nature judiciaire des chambres de recours, il est référé aussi à la décision du 26 octobre 1995 de la Chambre des lords du Royaume-Uni "Merrel Dow v. Norton", [1996] R.P.C. 76, cf. p. 82, ainsi qu'à la décision déjà citée du 20 décembre 1996 du "High Court of Justice" du Royaume-Uni, p. 274 s. (cf. supra sous 5,a). Même si la qualité d'autorité judiciaire venait à être contestée, il conviendrait de retenir que, compte tenu de ce qui précède, les chambres de recours constituent pour le moins une autorité quasi judiciaire, telle que visée par l'article 62(5) ADPIC.
d) Si donc selon son texte, l'article 62(5) ADPIC couvre la situation réglée par la CBE, il faut encore examiner sa relation avec l'article 32 ADPIC qui prévoit succinctement que pour toute décision concernant la révocation ou la déchéance d'un brevet, une possibilité de révision judiciaire sera offerte. Selon ETA, l'article 62(5) ADPIC n'entrerait pas en conflit avec l'article 32 ADPIC. Elle relève que le texte clair dudit article 62(5) ADPIC a trait aux décisions d'instances administratives et concerne par ailleurs les procédures relatives à tous les droits de la propriété industrielle, alors que l'article 32 ADPIC concerne spécifiquement les brevets et que la règle qu'il énonce ne s'applique pas seulement aux décisions administratives.
Cette argumentation ne peut pas être suivie. En effet, l'application du principe lex specialis derogat legi generali conduit au résultat contraire à celui préconisé par ETA. L'article 32 figure dans la Partie II de l'ADPIC relative aux normes concernant l'existence, la portée et l'exercice des droits de propriété intellectuelle. Cette partie ne contient pas de règles procédurales concernant l'acquisition de droits de brevets. Elle englobe plutôt, sauf certaines règles de droit matériel sur la brevetabilité, des dispositions concernant l'exercice des droits découlant d'un brevet. Par contre, la Partie IV ADPIC, dont l'article 62 est la seule disposition, concerne l'acquisition et le maintien des droits de propriété intellectuelle, et la règle procédurale contenue dans l'article 62(5) ADPIC doit être située précisément dans le contexte de l'acquisition de ces droits, dont l'obtention de brevets. Aux fins de l'application du principe de la loi spéciale, cet élément est donc beaucoup plus spécifique que celui basé sur le fait que l'article 32 ADPIC ne concerne que les brevets et que l'article 62 ADPIC traite aussi d'autres droits de propriété intellectuelle.
En ce qui concerne l'argument selon lequel l'article 62(5) ADPIC ne se réfère qu'aux décisions administratives, tandis que l'article 32 ADPIC concerne toutes les décisions, y compris les décisions judiciaires, il semble inconcevable, compte tenu de la spécificité de l'article 62 (5) ADPIC, que l'on ait voulu greffer une révision ultérieure (par le biais de l'article 32 ADPIC) sur celle prévue dans cette disposition.
Contrairement à la thèse développée dans l'article de von Morzé/Van Zant, The European Patent System and GATT TRIPs, article 32, I.P.Q. 1998, p. 117 s., cité par ETA, l'historique législatif de l'ADPIC ne fait pas obstacle à cette interprétation. L'article 32 ADPIC suit immédiatement l'article 31 ADPIC, qui apporte de plus amples restrictions aux limitations des licences obligatoires que celles figurant à l'article 5A de la Convention pour la protection de la propriété industrielle (Convention de Paris) et il reprend les termes "déchéance" et "révocation", figurant dans l'article 5A(3) de ladite Convention, dans son intitulé ainsi que dans son texte. Ceci semble bien refléter la préoccupation des négociateurs ADPIC de la Suisse, de la Commission européenne ainsi que des Etats-Unis d'Amérique de limiter les motifs de révocation d'un brevet dans le contexte de l'article 5A de la Convention précitée et d'instaurer pour ces cas une révision judiciaire (cf. op. cit. p. 124). Par la suite, une forte opposition des pays en voie de développement s'étant manifestée contre une trop grande limitation de ces motifs, la mention des motifs de révocation disparut et seule la mention de la révision judiciaire fut maintenue (cf. op. cit. p. 124). Même si, comme le soutiennent von Morzé/Van Zant, p. 124 s., il fallait admettre qu'il résulte de l'historique législatif de l'article 32 ADPIC que le législateur ADPIC avait voulu dépasser le cadre de l'article 5A de la Convention de Paris, rien ne permet de conclure qu'il ait voulu y régler la révocation des brevets avant la fin de la procédure de délivrance. En particulier, il n'y a aucune indication qu'il ait voulu modifier la solution spécifique et exhaustive de l'article 62(5) ADPIC en ce qui concerne la procédure d'acquisition de droits de propriété industrielle.
e) Nul ne pourra douter que la procédure d'opposition et de recours inter partes fasse partie de la procédure de délivrance d'un brevet européen, même si elle intervient après la délivrance du brevet. Le choix entre une procédure d'opposition et de recours avant la délivrance du brevet, telle que l'ont connue des pays comme la Suisse et l'Allemagne, et une telle procédure après délivrance a été longuement discuté lors de la création de la CBE. Cette dernière procédure a été finalement retenue pour ne pas prolonger outre mesure le laps de temps entre le dépôt d'une demande de brevet et sa délivrance, mais elle est restée partie intégrante de la procédure globale de délivrance. D'ailleurs, si les auteurs de la CBE avaient choisi le système de l'opposition avant délivrance, la question de l'application de l'article 32 ADPIC ne se poserait même pas, puisque, faute d'un brevet délivré, les décisions prises dans une telle procédure ne concerneraient jamais sa révocation ou sa déchéance. Ceci constitue un argument supplémentaire au soutien de la conclusion qu'en matière de délivrance de brevets, seul l'article 62(5) ADPIC entre en ligne de compte, car il paraît inadmissible de faire dépendre l'application de l'article 32 ADPIC du choix entre l'opposition avant ou après délivrance, un choix qui, dans le cadre de la CBE, a été fait pour des raisons entièrement étrangères au problème d'espèce.
f) Pour ces raisons, l'article 62(5) ADPIC prime l'article 32 ADPIC en matière de délivrance d'un brevet européen ; ni la CBE ni la pratique, qui s'est instaurée sous son empire, ne contreviennent à ce dernier article.
6. Au vu de ce qui précède, la réponse à la question posée de savoir si, dans le cadre de la CBE, des requêtes tendant à obtenir la révision de décisions des chambres de recours passées en force de chose jugée et fondées sur la violation alléguée d'un principe fondamental de procédure peuvent être valablement présentées, est négative.
Dès lors, il y a lieu d'examiner la question suivante, à savoir quelles suites administratives ou juridictionnelles il convient de réserver à de telles requêtes. Bien évidemment, la réponse négative en ce qui concerne de telles requêtes ne suffit pas comme réponse à cette question, car ces requêtes (par le biais d'un moyen existant dans la CBE ou sous une dénomination fantaisiste, comme p.ex. "action en annulation" ou "recours en cassation") peuvent néanmoins être présentées.
Comme l'a indiqué la chambre juridique, les suites réservées en l'espèce aux requêtes du 16 janvier 1992 peuvent être considérées comme des fins de non-recevoir de nature purement administrative. Cette pratique a été retenue pour donner suite aux quelques requêtes du même type présentées devant les chambres de recours depuis leur création. Contrairement à ce qu'a exposé ETA, elle n'est pas entièrement injustifiée, compte tenu de la conclusion, à laquelle la Grande Chambre de recours est arrivée dans la présente décision en ce qui concerne la validité du dépôt de ces requêtes. Toutefois, des requêtes émanant d'une partie à l'affaire qui a donné lieu à une décision d'une chambre de recours passée en force de chose jugée et tendant à son annulation, doivent être considérées comme s'adressant à la chambre concernée en tant qu'autorité judiciaire. Le principe des suites juridictionnelles paraît donc mieux correspondre aux principes de procédure généralement admis que celui des suites administratives. Puisque ces requêtes, telles qu'elles ont été qualifiées par la chambre juridique, ne peuvent pas être déposées valablement, la suite qui doit leur être réservée est celle de l'irrecevabilité. De plus, cette solution s'inscrit davantage dans la logique de la règle 65(1) CBE, invoquée par ETA. Il s'agit cependant d'une irrecevabilité toute particulière, la situation étant celle d'un moyen de recours (au sens large) inexistant.
Quant à la compétence pour statuer sur ces requêtes, elle appartient à la chambre de recours qui a pris la décision entreprise et non pas à une autre chambre ou la Grande Chambre de recours, qui, dans le système de la CBE, n'est pas une instance de recours. Si de telles requêtes sont adressées à d'autres instances, elles doivent donc être transmises à cette chambre. Il n'est par ailleurs pas nécessaire que la chambre siège dans la même composition que celle dans laquelle elle a rendu la décision entreprise.
Afin que la suite juridictionnelle s'applique, il faut bien évidemment que la requête, quelle qu'en soit la forme, réponde à la qualification donnée par la chambre juridique, c'est-à-dire une requête qui tend à la révision d'une décision d'une chambre de recours passée en force de chose jugée. Si cette volonté ne ressort pas clairement (p.ex. dans le cas d'une lettre où une partie exprime simplement son insatisfaction sans demander l'annulation de la décision), les suites éventuelles demeureront de nature administrative. Il appartiendra à la jurisprudence de délimiter ces cas.
Quant à la procédure à suivre pour donner la suite juridictionnelle aux requêtes telles qu'elles ont été qualifiées par la chambre juridique, la question se pose de savoir si toutes les règles de la CBE applicables aux procédures ordinaires devant les chambres de recours doivent être appliquées, notamment le droit des autres parties de prendre position sur les requêtes, le respect de délais minima ou encore le droit à une procédure orale. Comme les requêtes en question ne peuvent pas être déposées valablement et doivent aboutir à une irrecevabilité résultant de l'usage d'un moyen de recours (au sens large) inexistant, il paraît évident qu'une telle application prolongerait les procédures d'une façon qui serait difficilement compatible avec la sécurité juridique. Pour cette raison, la chambre concernée pourra procéder immédiatement et sans autre formalité processuelle à l'examen d'une requête tendant à la révision de sa propre décision. Si elle arrive à la conclusion que cette requête est du type des requêtes visées par la chambre juridique dans la question soumise à la Grande Chambre de recours, elle rendra immédiatement la décision d'irrecevabilité.
7. La suite juridictionnelle à donner aux requêtes, telles qu'elles ont été qualifiées par la chambre juridique, met fin à la pratique des suites administratives suivie jusqu'à présent. La question se pose donc de savoir à partir de quel moment ce changement doit s'opérer.
Comme les requêtes visées ne peuvent pas être déposées valablement et doivent donc être déclarées irrecevables, l'application de la suite juridictionnelle pour le passé ne se justifie pas. En effet, remplacer les fins de non-recevoir de nature administrative appliquées dans le passé par des fins de non-recevoir de nature juridictionnelle serait dépourvu de toute espèce d'utilité. La seule circonstance qu'après une fin de non-recevoir de nature administrative, une partie ait poursuivi une action en révision par divers moyens, comme dans le cas d'espèce, ne justifie aucunement qu'une exception soit faite en sa faveur. D'autre part, dans le cas invraisemblable où une requête en principe recevable aurait été écartée par une suite administrative de non-recevoir, l'intérêt des autres parties et des tiers de ne pas voir remettre en question une décision ayant acquis force de chose jugée dans le passé s'oppose à une application rétroactive de la suite juridictionnelle (cf. dans ce contexte la décision G 9/93, JO OEB 1994, 891, point 6.1 des motifs). Il y a donc lieu de ne réserver une suite juridictionnelle qu'aux requêtes dirigées contre une décision d'une chambre de recours portant une date postérieure à celle de la présente décision.
8. Il reste à donner une réponse à la deuxième question posée par la chambre juridique concernant la mention sur le Registre européen des brevets des requêtes telles qu'elles ont été qualifiées par elle et de la procédure retenue à leur égard.
Il résulte de ce qui précède que ces requêtes ne peuvent pas être valablement déposées puisqu'elles ne sont pas prévues dans le cadre de la CBE. Dès lors, une inscription de ces requêtes ou de la procédure aboutissant à une fin de non-recevoir ne peut pas entrer en ligne de compte sur la base de l'article 127 CBE et la règle 92(1) CBE. Il ne serait également pas justifié que le Président de l'OEB prévoie leur inscription selon la règle 92(2) CBE puisque cette inscription concernerait des requêtes et des procédures y relatives, vouées à l'échec.
Dès lors, lorsque la division juridique est appelée à statuer quant à l'inscription de telles requêtes au Registre européen des brevets, elle doit s'abstenir de prescrire cette inscription s'il apparaît que, quelle qu'en soit la forme, ces requêtes sont fondées en réalité sur la violation alléguée d'un principe fondamental de procédure et tendent à la révision d'une décision passée en force de chose jugée prise par une chambre de recours. La tâche de la division juridique sera d'autant plus aisée que la requête en révision aura déjà pu faire l'objet d'une décision d'irrecevabilité par une chambre de recours dans une procédure accélérée (cf. supra sous 6).
9. Bien que la Grande Chambre de recours ait conclu que dans le cadre de la CBE des requêtes fondées sur la violation alléguée d'un principe fondamental de procédure ne peuvent pas être valablement déposées et notamment qu'un moyen spécifique ne peut pas être créé par voie prétorienne sur la base de l'article 125 CBE, elle tient cependant à souligner que si, d'une part, la sécurité juridique et le principe selon lequel tout litige doit prendre fin dans des délais raisonnables sont des éléments essentiels dans tout système juridictionnel, une violation flagrante d'un principe fondamental de procédure heurte, d'autre part, l'idée de justice et nuit gravement à l'image des juridictions. Tel serait, par exemple, le cas d'une décision qui s'avère avoir été influencée de façon décisive par un acte illicite, voire même criminel, comme un faux en écritures ou un faux témoignage. Le législateur est donc invité à prévoir une possibilité de révision des décisions des chambres de recours passées en force de chose jugée dans des cas bien précis où une grave violation d'un principe fondamental de procédure a eu lieu. Il ne lui appartiendrait pas seulement de déterminer ces cas, mais encore de régler les modalités, y compris la protection des tiers. Compte tenu de la nature fondamentale d'un tel moyen et de ce que, dans le système des brevets européens, la base des procédures de recours (au sens large) est traitée dans la CBE, cette possibilité de révision devrait être prévue, au moins en ce qui concerne ses principes de base, dans la Convention même.
Dispositif
Par ces motifs, il est statué comme suit :
La Grande Chambre de recours apporte les réponses suivantes aux questions de droit qui lui ont été soumises :
1. Dans le cadre de la Convention sur le brevet européen, il convient de réserver une suite juridictionnelle d'irrecevabilité aux requêtes fondées sur la violation alléguée d'un principe fondamental de procédure et qui tendent à la révision d'une décision passée en force de chose jugée prise par une chambre de recours de l'OEB.
2. La décision d'irrecevabilité appartient à la chambre de recours qui a pris la décision dont la révision est demandée. Elle pourra être rendue immédiatement et sans autre formalité processuelle.
3. Cette suite juridictionnelle ne vaut que pour lesdites requêtes dirigées contre une décision d'une chambre de recours portant une date postérieure à celle de la présente décision.
4. Lorsque la division juridique de l'OEB est appelée à statuer quant à l'inscription au Registre européen des brevets d'une requête dirigée contre une décision d'une chambre de recours, elle doit s'abstenir de prescrire cette inscription s'il apparaît que, quelle qu'en soit la forme, cette requête est fondée sur la violation alléguée d'un principe fondamental de procédure et tend à la révision d'une décision passée en force de chose jugée prise par une chambre de recours.