CHAMBRES DE RECOURS
Décisions de la Chambre de recours juridique
Décision de la chambre de recours juridique, en date du 27 avril 2001 - J 24/96 - 3.1.1
(Traduction)
Composition de la Chambre :
Président : | J.-C. Saisset |
Membres : | B.J. Schachenmann |
| M.K. S. Aúz Castro |
Demandeur : G.D. SOCIETÀ PER AZIONI
Référence : Unité d'invention/G.D. SOCIETÀ PER AZIONI
Article : 21 (3) c) CBE
Mot-clé : „Unité d'invention – oui" – "Vice de procédure – non"
Sommaire
Dans le cadre de l'application de la règle 46 CBE, il incombe à la division d'examen (et à la chambre de recours) d'examiner si la division de recherche était fondée à adresser au demandeur une notification au titre de la règle 46 (1) CBE pour l'inviter à payer de nouvelles taxes de recherche. Il n'est dès lors pas nécessaire que la division d'examen réponde en détail, dans une décision rendue au titre de la règle 46 (2) CBE, à d'autres objections soulevées par le demandeur à propos de la recherche en question.
Exposé des faits et conclusions
I. Le présent recours est dirigé contre une décision de la division d'examen de l'OEB rejetant une demande de remboursement au titre de la règle 46 (2) CBE de sept taxes de recherche que le demandeur (requérant) avait acquittées à la demande de la division de la recherche.
II. Dans sa notification du 15 avril 1993, la division de la recherche avait signalé que les inventions revendiquées dans la demande de brevet européen n° 92 120 123.2 apparaissaient a posteriori comme dénuées d'unité. Selon elle, l'enseignement des documents appartenant à l'état de la technique qui avaient été cités dans le rapport partiel de recherche (GB-A-2 213 456 et EP-A-0 071 736) faisait obstacle à la nouveauté de l'invention définie dans les revendications indépendantes 1 et 8. En conséquence, les inventions définies dans les revendications dépendantes 2 à 6 et 12 à 14 n'étaient pas liées entre elles de manière à ne former qu'un seul concept inventif. Il a été notifié au demandeur que si le rapport de recherche devait englober ces inventions, il devait acquitter une nouvelle taxe de recherche pour chaque invention concernée.
III. Le demandeur a déclaré alors qu'il voulait une recherche complète et a acquitté sept taxes de recherche additionnelles. La division de la recherche a dès lors effectué une recherche complète et transmis le résultat au demandeur.
IV. Au cours de l'examen, la division d'examen a maintenu l'objection d'absence d'unité. Elle a estimé que l'enseignement d'un autre document appartenant à l'état de la technique (EP-A-0 031 515) faisait obstacle à la nouveauté de l'invention définie dans les revendications indépendantes 1 et 8 et que les revendications dépendantes n'étaient plus liées entre elles de façon à ne former qu'un seul concept inventif au sens de l'article 82 CBE.
V. Le demandeur a répondu en déposant de nouvelles revendications 1 et 8 qu'il avait limitées par rapport au document EP-A-0 031 515, pour répondre à l'objection concernant l'absence d'unité. Il a en outre demandé le remboursement des taxes de recherche additionnelles qu'il avait acquittées.
VI. Dans sa décision du 20 juin 1996, la division d'examen a rejeté la demande de remboursement des taxes de recherche présentée par le demandeur, ceci pour les motifs suivants :
Même si la limitation apportée aux revendications 1 et 8 au cours de l'examen découlait à l'évidence de la description et des dessins, elle n'existait pas dans la revendication 1 initiale.
Par conséquent, la division de la recherche avait dû effectuer une recherche à propos de l'objet de cette revendication en tant que tel. Bien que le domaine technique sur lequel portait la demande fût limité, certaines au moins des différentes inventions faisaient intervenir des concepts nécessitant des efforts supplémentaires de recherche. Les principes posés au point B-VII, 2.3 des Directives relatives à l'examen pratiqué à l'OEB n'étaient dès lors pas applicables. A l'inverse, s'il apparaît que l'objet d'une revendication indépendante n'est pas brevetable, les Directives (C-III, 7.8, dernier paragraphe) prévoient qu'il convient d'examiner avec soin s'il existe toujours un lien inventif entre toutes les revendications dépendant de cette revendication. Par conséquent, il convenait également de poser la question de l'unité d'invention dans le cas des revendications qui dépendaient des revendications 1 et 8. Pour ces raisons, l'objection soulevée par la division de la recherche à propos de l'absence d'unité de l'invention devait être considérée comme justifiée.
VII. Le requérant a formé un recours contre cette décision le 25 juillet 1996, et a acquitté à cet effet le 31 juillet 1996 le montant intégral de la taxe. Dans l'exposé des motifs du recours qu'il a produit le 1er août 1996, il a fait observer, en ce qui concerne l'unité de l'invention, que la division de la recherche avait classé l'objet de la demande de brevet ainsi que toutes les inventions s'y rapportant dans un seul sous-groupe de la Classification internationale des brevets (B65B-41/06), et que tous les documents pertinents cités dans le rapport de recherche relevaient de trois sous-groupes, à savoir B65B-41/06, B65B-41/12 et B65B-41/14, ce qui montrait que les inventions jugées différentes par la division de la recherche avaient toutes trait au même domaine technique très étroit, qui aurait pu faire l'objet de recherches ne nécessitant pas d'efforts particuliers. Le requérant a également contesté la conclusion selon laquelle les revendications indépendantes initiales 1 et 8 étaient dénuées de nouveauté par rapport aux documents cités dans le rapport partiel de recherche. Il a fait valoir en particulier qu'aucun de ces documents ne mentionnait l'étape consistant à tirer des portions (8) de matériau d'emballage par les moyens de saisie (47) le long de la surface de transport. Les revendications indépendantes initiales 1 et 8 étant par conséquent nouvelles, l'objection relative à l'absence d'unité qui avait été constatée a posteriori n'était donc pas justifiée.
En outre, le requérant a prétendu que la procédure devant la division de la recherche et devant la division d'examen était entachée de vices de procédure.
Le premier vice de procédure concernait l'établissement du rapport partiel de recherche, qui était incomplet puisqu'il n'avait été établi que pour les revendications 1, 2, 8 et 9, alors que selon le point B-III, 3.8 des Directives, il aurait également dû englober toutes les revendications dépendant des revendications 2 et 9 qui avaient fait l'objet d'une recherche. Un deuxième vice de procédure tenait au fait que la division d'examen n'avait pas tenu compte de cette objection dans sa décision, bien que le demandeur ait soulevé cette objection dans sa demande de remboursement des taxes de recherche.
Pour tous ces motifs, le requérant demande à présent à la Chambre de recours d'annuler la décision attaquée et de
- réexaminer la question de la prétendue absence d'unité,
- rembourser les nouvelles taxes de recherche,
- rembourser la taxe de recours.
Motifs de la décision
1. Le recours satisfait aux dispositions citées à la règle 65 (1) CBE et est dès lors recevable.
2. La décision de la division d'examen attaquée par le requérant n'avait trait qu'au remboursement de nouvelles taxes de recherche au titre de la règle 46 (2) CBE. Elle ne concernait donc pas le rejet de la demande ni la délivrance du brevet. Par conséquent, la Chambre de recours juridique est compétente pour examiner le présent recours conformément à l'article 21 (3)c) CBE.
3. La seule question que doit examiner la Chambre est celle de savoir si la notification de la division de la recherche en date du 15 avril 1993 (cf. point II supra) était justifiée (règle 46 (2) CBE). La division d'examen a répondu à cette question par l'affirmative.
La notification de la division de la recherche se fondait sur une évaluation a posteriori de l'unité d'invention, c'est-à-dire une évaluation après prise en considération de l'état de la technique. Par conséquent, l'absence d'unité tenait au fait que, ainsi que l'avait conclu la division de la recherche, Ail ressortait de l'état de la technique, cf. le rapport de recherche, qu'un procédé ainsi qu'un dispositif pour amener des portions de matériau d'emballage jusqu'à une machine d'emballage, tels que décrits dans les revendications 1 et 8, étaient connus". Ce n'est que si cette conclusion était correcte, et uniquement dans cette mesure, que la notification relative à l'absence d'unité de l'invention était justifiée. Il convient donc à présent d'examiner si les revendications initiales 1 et 8 étaient effectivement dénuées de nouveauté par rapport à l'état de la technique cité dans le rapport partiel de recherche, c'est-à-dire par rapport à l'enseignement des documents GB-A-2 213 456 (D1) et EP-A-0 071 736 (D2).
3.1 L'invention selon la revendication initiale 1 concerne un procédé pour amener des portions (8) de matériau d'emballage (par ex. des morceaux de papier) jusqu'à une machine d'emballage. La machine d'emballage possède un poste de transfert (5) dans lequel les portions du matériau d'emballage sont pliées autour des produits (4) à emballer.
L'une des caractéristiques de cette revendication consiste en ce que les portions du matériau d'emballage Asont tirées ... vers le poste de transfert" (c'est la Chambre qui souligne). En particulier, les moyens de saisie (47) sont activés pour entrer en prise successivement... avec les portions ... et ainsi tirer les portions, par l'intermédiaire desdits moyens de saisie, le long de la surface de transport" (c'est la Chambre qui souligne). Selon la description, l'avantage du procédé revendiqué tient à ce que les portions de matériau d'emballage sont transportées par traction (tirées), tandis que dans l'état de la technique, elles étaient poussées (cf. par ex. colonne 1, lignes 34 s.), ce qui pouvait entraîner des ondulations. Il ressort donc clairement de la demande telle que déposée que le transport de portions de matériau d'emballage par traction plutôt que par poussée est une caractéristique importante, qui implique que les forces de transport ne sont appliquées que sur la partie avant des portions de matériau d'emballage.
3.2 Dans les documents D1 et D2 appartenant à l'état de la technique qu'a cités la division de la recherche, le matériau d'emballage est amené par des courroies transporteuses sans fin d'un convoyeur à vide qui maintiennent sous vide les portions de matériau d'emballage sur toute la longueur de leurs bords latéraux. Pour pouvoir amener ces portions, il faut ainsi appliquer des forces de poussée sur la partie arrière de chaque portion, ce qui ne permet pas d'exclure la formation d'ondulations.
3.3 Par conséquent, l'objet des revendications indépendantes 1 et 8 diffère par la caractéristique mentionnée au point 3.1. de l'état de la technique qui a été cité. Il semble que la division de la recherche n'ait pas reconnu l'importance de cet aspect, car elle n'a pas attribué à l'expression Atirer" la signification technique spécifique qui ressort de l'enseignement de la demande. Or, comme cela a été mentionné plus haut, cette caractéristique constitue un concept inventif général commun à toutes les revendications (art. 82 CBE). L'objection d'absence d'unité qui a été formulée à propos des revendications dépendantes n'était donc pas justifiée. Les nouvelles taxes de recherche doivent dès lors être remboursées.
4. Puisqu'il peut être fait droit au recours, il reste encore à déterminer si le remboursement de la taxe de recours qui a été demandé est justifié en raison de l'existence d'un vice substantiel de procédure (règle 67 CBE) (cf. allégations des requérants mentionnées ci-dessus au point VII).
Pour ce qui est de la notification établie par la division de la recherche au titre de la règle 46 (1) CBE, la Chambre convient avec le requérant que c'est à tort qu'il a été conclu à l'absence d'unité de l'invention (point 3.3 ci-dessus). Toutefois, il s'agissait là d'une simple erreur de jugement qui ne saurait être considérée comme un vice de procédure. Quant à la critique concernant le caractère incomplet du rapport partiel de recherche, il doit être considéré que le fait, pour un service de l'OEB, de ne pas suivre une procédure arrêtée dans les directives ne constitue pas en soi un vice de procédure, puisque les Directives ne sont pas juridiquement contraignantes (cf. par ex. décision T 42/84, JO OEB 1988, 251).
A propos de la deuxième objection soulevée par le requérant, il se pose la question de savoir si, dans sa décision, la division d'examen aurait dû examiner si le rapport partiel de recherche était incomplet, comme l'a prétendu le requérant. Dans le cadre de l'application de la règle 46 CBE, il incombe à la division d'examen (et à la chambre de recours) d'examiner si la division de la recherche était fondée à adresser au demandeur une notification au titre de la règle 46 (1) CBE pour l'inviter à payer de nouvelles taxes de recherche. Toutefois, la règle 46 (2) CBE ne concerne pas les actes des divisions de recherche autres que les communications émises au titre de la règle 46 (1) CBE. Il n'est dès lors pas nécessaire que la division d'examen réponde en détail, dans une décision rendue au titre de la règle 46 (2) CBE, à d'autres objections soulevées par le demandeur à propos de la recherche, comme par exemple l'objection selon laquelle le rapport partiel de recherche n'a pas été établi conformément aux Directives. Afin d'éviter tout malentendu, la Chambre fait observer que les divisions d'examen ont bien entendu la possibilité de faire effectuer un complément de recherche si elles estiment qu'un rapport de recherche établi par la division de la recherche est incomplet, mais cela n'a rien à voir avec une décision officielle de remboursement sur demande de nouvelles taxes de recherche, rendue au titre de la règle 46 (2) CBE.
La Chambre ne peut donc reconnaître l'existence d'un vice substantiel de procédure justifiant le remboursement de la taxe de recours.
Dispositif
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision attaquée est annulée.
2. Il est ordonné le remboursement des nouvelles taxes de recherche acquittées par le demandeur.
3. La demande de remboursement de la taxe de recours est rejetée.