CHAMBRES DE RECOURS
Décisions de la Chambre de recours juridique
Décision de la Chambre de recours juridique 3.1.1 en date du 14 juillet 1997 - J 16/96
(Traduction)
Composition de la Chambre :
Président : | M. Aúz Castro |
Membres : | B. Schachenmann |
S. Perryman |
Demandeur : N.N.
Référence : Groupement de mandataires/N.N.
Article : 23(3), 33(1)b), 133 et 134 CBE
Règle : 101, 109(9) CBE
Article : 31(1), 31(3)a) et 31(4) de la Convention de Vienne sur le Droit des Traités
Mot-clé : "Substitution de partie dans une procédure de recours ex parte - autorisée si elle est opportune" - "Groupement de mandataires - peut également comprendre des mandataires n'exerçant pas à titre libéral"
Sommaire
Un groupement de mandataires au sens de la règle 101(9) CBE peut également être formé par des mandataires agréés n'exerçant pas à titre libéral.
Exposé des faits et conclusions
I. Par lettre du 10 janvier 1996 adressée à l'Office européen des brevets, la Société X a demandé que son département brevets soit enregistré en tant que groupement de mandataires au sens de la règle 101(9) CBE. Le groupement devait se composer de trois mandataires agréés, nommément cités, qui étaient employés auprès de cette entreprise.
II. Le 23 février 1996, l'Office européen des brevets a communiqué au demandeur que son département brevets ne pouvait pas être enregistré en tant que groupement de mandataires. Ainsi qu'il ressort de la "Communication concernant des questions relatives à la représentation près l'OEB" (JO OEB 1979, 92), il y a lieu d'entendre par "groupement de mandataires" un groupement dont seuls font partie des mandataires agréés exerçant leurs activités de façon libérale. Vu que les employés du département brevets d'une entreprise ne sauraient être considérés comme des mandataires exerçant à titre libéral, ils ne peuvent pas être inscrits en tant que groupement.
III. La Société X a requis une décision en l'espèce, qui soit susceptible de recours. Celle-ci a été rendue le 22 avril 1996. Dans l'énoncé des motifs, la division juridique de l'Office européen des brevets a fait valoir que l'interprétation de l'expression "groupement de mandataires", selon laquelle un tel groupement se compose uniquement de mandataires agréés exerçant à titre libéral, repose sur une décision de 1978 du Conseil d'administration de l'Organisation européenne des brevets, relative à l'interprétation de la règle 101(9) CBE. En vertu de cette décision, des mandataires agréés n'exerçant pas leurs activités de façon libérale ne peuvent pas faire partie d'un groupement. Le Conseil d'administration a motivé cet avis juridique en se référant à l'intention du législateur, lequel visait uniquement les membres de la profession libérale, lorsqu'il a créé le paragraphe 9. Il a également bien précisé que dans le cadre de cette interprétation, un mandataire agréé devait être considéré comme exerçant ses activités de façon libérale, lorsqu'il travaille pour son propre compte en tant que conseil en brevets ou lorsqu'il est employé chez un conseil en brevets indépendant. S'il est vrai que le libellé de la règle 101(9) CBE ne comporte pas la notion de "mandataire exerçant ses activités de façon libérale", mais parle d'une manière générale de "mandataires", il n'en demeure pas moins que l'interprétation de la loi donnée par le Conseil d'administration s'impose à l'Office européen des brevets. Etant donné que les employés du demandeur n'exercent pas leurs activités à titre libéral et qu'ils ne sont pas employés chez un mandataire indépendant, il convient de rejeter la demande d'inscription en tant que groupement.
IV. Le demandeur a formé le 29 avril 1996 un recours contre cette décision, qu'il a motivé par écrit le 4 juillet 1996. Dans son mémoire exposant les motifs du recours, il invoque pour l'essentiel les arguments suivants
i) Comme l'a reconnu elle-même la division juridique de l'OEB, la règle 101(9) CBE ne comporte pas la notion de "mandataire exerçant à titre libéral". L'important toutefois, c'est que la Convention dans son ensemble n'établit aucune distinction entre des "mandataires" et des "mandataires exerçant à titre libéral". La notion de "mandataires exerçant à titre libéral", qui a été introduite dans la décision interprétative du Conseil d'administration, est dénuée de tout fondement dans la Convention. En effet, les mandataires agréés employés auprès d'une entreprise industrielle seraient défavorisés de manière arbitraire et sans base légale. Telle ne peut avoir été l'intention du législateur.
ii) Dans les Etats contractants, comme la Suisse, les cabinets de conseils en brevet sont de plus en plus fréquemment organisés en sociétés par actions. Les mandataires y travaillant sont donc des employés d'une société par actions, et non d'un mandataire exerçant à titre libéral, comme l'exige la décision du Conseil d'administration relative à l'interprétation de la règle 101(9) CBE pour l'inscription en tant que groupement. Par conséquent, l'interprétation du Conseil d'administration ne peut dans ce cas même pas s'appliquer à des mandataires exerçant à titre libéral.
iii) La Société X fait partie du groupe X et comprend notamment le département brevets du groupe. Elle ne possède pas elle-même de brevets, mais traite en premier lieu, par l'intermédiaire de son département brevets, des affaires de brevets et de marques d'autres entreprises du groupe. Toutefois, elle a également pour clients d'autres entreprises entièrement indépendantes du groupe X. Les activités du département brevets sont donc dans une large mesure identiques à celles d'un cabinet indépendant de conseils en brevets. Le fait que les mandataires agréés soient des employés d'une société par actions ne doit pas faire obstacle à leur inscription en tant que groupement.
iv) L'enregistrement en tant que groupement des mandataires agréés travaillant dans les départements brevets de sociétés industrielles contribue justement à simplifier le déroulement interne du travail et à créer des conditions juridiques claires en matière de pouvoir.
V. Dans sa convocation du 5 juin 1997 à la procédure orale, la Chambre a fait observer qu'un groupement au sens de la règle 101(9) CBE devait se composer de mandataires, c'est-à-dire de personnes habilitées à assurer la représentation devant l'OEB. Toutefois, il ressortait de la correspondance figurant à cette date au dossier que des personnes qui n'étaient ni mandataires agréés, ni membres du groupement demandé agissaient également au nom de la Société X. Par conséquent, il n'était pas possible de demander au nom de la Société X la désignation d'un groupement au sens de la règle 101(9) CBE, ni de l'enregistrer sous ce nom.
VI. Par lettre du 12 juin 1997, le mandataire de la Société X a déclaré que l'enregistrement demandé du groupement concernait exclusivement les trois personnes initialement mentionnées, qui étaient toutes mandataires agréés. La demande d'inscription avait été présentée au nom de la Société X dans le seul but de fournir la preuve du consentement de l'employeur. Toutefois, il n'était pas exclu que la demande soit de nouveau présentée au nom des trois mandataires agréés près l'OEB par l'un d'eux, si la Chambre autorisait a posteriori une telle modification.
VII. La procédure orale devant la Chambre de recours a eu lieu le 14 juillet 1997. En introduction, la Présidente a fait observer qu'il convenait tout d'abord de clarifier la question de savoir si une partie pouvait se substituer à une autre. Tel serait le cas si le demandeur initial, à savoir la Société X, devait être remplacé par les trois mandataires agréés, mentionnés dans la requête initiale. Une telle substitution équivaut à modifier l'objet de la demande, ce qui n'est recevable en vertu des principes généraux du droit procédural que si cela paraît opportun.
VIII. Le mandataire de la Société X, M. A (n° d'inscription xx xxx) , qui est l'un des membres du groupement demandé, a requis en son nom ainsi qu'au nom des deux mandataires agréés M. B (n° d'inscription xx xxx) et M. C. (n° d'inscription xx xxx), l'annulation de la décision contestée et l'inscription des personnes citées, en tant que groupement, sous le nom "département brevets X", c/o Société X, adresse.
La substitution de partie qui est liée à cette demande est opportune, car elle permet d'éviter une répétition de la procédure avec les nouveaux demandeurs.
Sur le fond, le mandataire a fait valoir que la restructuration de la Société X, engagée dix ans plus tôt environ, s'était traduite par la création d'un grand nombre de filiales dotées de la personnalité juridique, ce qui a considérablement compliqué la gestion des pouvoirs dans le département brevets. La désignation d'un groupement de mandataires prévue à la règle 101(9) CBE constitue pour le département brevets du groupe un moyen approprié de simplifier la situation. En ce sens, ce département ne se distingue plus d'un cabinet traditionnel de conseils en brevets. De plus, contrairement à ce qui peut se produire dans un tel cabinet, le départ d'un membre du groupement ne risque pas d'occasionner des conflits quant à l'attribution des clients. C'est pourquoi la possibilité de désigner un groupement de mandataires prévue à la règle 101(9) CBE convient particulièrement bien aux départements brevets, tels qu'ils existent actuellement dans l'industrie.
Motifs de la décision
1. Le recours est dirigé contre la décision de la division juridique de l'Office européen des brevets, par laquelle elle a rejeté la demande de la Société X concernant l'inscription de trois de ses employés en tant que groupement de mandataires au nom de la Société X. Cette décision fait grief au demandeur initial, lequel a dûment formé un recours dans le délai prescrit. Le recours est donc recevable.
Au cours de la procédure de recours, les requêtes ont été modifiées de telle façon que l'inscription en tant que groupement est désormais demandée par les trois mandataires employés dans la Société X. La Chambre autorise ainsi la substitution de partie qui en résulte dans la présente procédure. Une telle substitution paraît opportune pour des raisons d'économie de procédure, car elle permet d'éviter une répétition de la procédure en première instance pour des raisons de pure forme. En outre, dans la présente procédure ex parte, elle ne concerne aucune autre partie à la procédure.
2. La décision contestée se fonde sur l'interprétation de la disposition de la règle 101(9) CBE, faite par le Conseil d'administration de l'Organisation européenne des brevets lors de sa quatrième session, qui s'est déroulée du 19 au 21 décembre 1978 (cf. doc CA/PV 4). En vertu d'une décision du Conseil d'administration prise lors de cette session, il y a lieu d'entendre par "groupement de mandataires" un groupement dont seuls font partie des mandataires agréés exerçant leurs activités dans le cadre de la profession libérale. L'instance du premier degré a estimé qu'elle était liée par cette interprétation. Il se pose tout d'abord la question de savoir si cela s'applique également aux chambres de recours.
2.1 En vertu de l'article 33(1)b) CBE, le Conseil d'administration de l'Organisation européenne des brevets a compétence pour modifier le règlement d'exécution. La Convention ne contient par ailleurs aucune disposition habilitant expressément le Conseil d'administration à adopter des décisions ayant effet erga omnes en vue d'interpréter la Convention. Dans le droit des organisations internationales, il est un principe reconnu selon lequel les instances habilitées à adopter des dispositions de droit interne peuvent également revendiquer dans une mesure appropriée le droit de les interpréter (cf. Seidl-Hohenveldern, Das Recht der Internationalen Organisationen (...), 5e édition, page 233, point 1614). Dans la mesure où la décision interprétative concerne, comme en l'espèce, une disposition du règlement d'exécution, le Conseil d'administration a agi dans le cadre de cette compétence, ce que les requérants n'ont d'ailleurs pas contesté.
2.2 Cependant, la question de savoir si ces décisions du Conseil d'administration s'imposent également aux chambres de recours est toujours sans réponse. Conformément à la Convention (articles 106 et s. CBE), les chambres de recours sont appelées, en tant qu'instances juridictionnelles, à statuer sur les recours dans chaque cas particulier. Cela comprend notamment l'interprétation des dispositions de la Convention, y compris le règlement d'exécution et les protocoles (article 164(1) CBE). L'indépendance du juge requise à cet effet est ancrée à l'article 23(3) CBE, en vertu duquel les membres des chambres ne sont liés dans leurs décisions par aucune instruction et ne doivent se conformer qu'aux seules dispositions de la présente convention.
En conséquence, les chambres de recours ne sont aucunement liées, sur le plan formel, par une quelconque décision interprétative du Conseil d'administration, une telle décision ne pouvant pas davantage être considérée comme une instruction à suivre dans leurs décisions.
2.3 Toutefois, lorsqu'elles interprètent les dispositions de la Convention, les chambres de recours doivent tenir compte de tous les éléments pertinents aux fins de l'interprétation. Ceux-ci comprennent également, dans la présente espèce, la décision interprétative citée du Conseil d'administration. Si la Chambre n'est pas liée par cette décision, elle peut néanmoins en tenir compte dans le cadre de l'interprétation.
3. En vertu de la jurisprudence constante des chambres de recours, il convient, aux fins de l'interprétation de la Convention sur le brevet européen, d'appliquer les règles d'interprétation de la Convention de Vienne sur le Droit des Traités du 22 mai 1969 (cf. G 6/83, JO OEB 1985, 67, et le communiqué relatif à "l'interprétation des traités internationaux (...)", JO OEB 1984, 192). Conformément à la règle générale d'interprétation visée à l'article 31(1) de la Convention de Vienne, la CBE "doit être interprétée de bonne foi suivant le sens ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son objet et de son but". De même, en vertu de l'article 31(3)a) de la Convention de Vienne, il sera tenu compte "de tout accord ultérieur intervenu entre les parties au sujet de l'interprétation du traité ou de l'application de ses dispositions".
Il se pose donc la question de savoir quelle est l'importance à attacher à la décision interprétative du Conseil d'administration dans le cadre de l'interprétation des dispositions de la règle 101(9) CBE.
3.1 Il convient tout d'abord de noter que la règle 101(9) CBE ne faisait pas partie de la Convention telle que signée à la Conférence de Munich le 5 octobre 1973, mais qu'elle a été insérée ultérieurement dans la Convention, par décision du Conseil d'administration du 20 octobre 1977, entrée en vigueur le 1er février 1978. La décision citée du Conseil d'administration relative à l'interprétation de cette disposition est encore plus récente (cf. point 2 supra). Ni la règle 101(9) CBE, ni la décision interprétative n'ont donc pour origine un accord des Etats contractants, mais constituent des dispositions créées par l'Organisation européenne des brevets elle-même. Par conséquent, les règles d'interprétation prévues dans la Convention de Vienne sur le Droit des Traités ne s'appliquent en l'espèce que par analogie.
3.2 A cet égard, la décision interprétative du Conseil d'administration revêt pour l'essentiel la même importance qu'un accord ultérieur intervenu entre les parties au sujet de l'interprétation du traité ou de l'application de ses dispositions, tel que prévu dans la Convention de Vienne sur le Droit des Traités (article 31(3)a) de la Convention de Vienne). Elle équivaut donc, aux fins de l'interprétation de la règle 101(9) CBE, à la règle générale d'interprétation visée à l'article 31(1) de la Convention de Vienne (cf. point 3 supra).
3.3 La règle d'interprétation visée à l'article 31(4) de la Convention de Vienne sur le Droit des Traités ne s'applique pas en l'espèce. Selon cette règle, un terme sera entendu dans un sens particulier s'il est établi que telle était l'intention des parties. Or, les travaux préparatoires relatifs à la création de la règle 101(9) CBE ne font pas apparaître que l'ensemble des parties avaient clairement l'intention de donner un sens particulier au terme en question (cf. point 4.4 infra).
4. En application des règles d'interprétation expliquées ci-dessus, la Chambre tire en l'espèce les conclusions suivantes.
4.1 La règle 101(9) CBE s'inscrit dans le système des articles 133 et 134 CBE relatifs à la représentation dans les procédures instituées par la Convention. Ces dispositions prévoient notamment que la représentation de personnes physiques ou morales dans les procédures devant l'Office européen des brevets ne peut en principe être assurée que par des "mandataires agréés" (article 134(1) CBE), bien que dans certaines conditions, des avocats puissent être assimilés à des mandataires agréés (article 134(7) CBE). Les employés qui ne sont pas mandataires agréés constituent un groupe à part, car ils ne peuvent agir en tant que mandataires.
L'expression "mandataire agréé" désigne donc une catégorie professionnelle dont les membres sont tous habilités au même titre à agir pour le compte de tiers dans toute procédure instituée par la CBE (article 134(4) CBE), et ce, qu'ils exercent à titre libéral ou qu'ils soient employés dans le département brevets d'une entreprise. Cette assimilation ressort également du règlement en matière de discipline des mandataires agréés (RDM), que le Conseil d'administration a arrêté sur la base de l'article 134(8)c) CBE. Les règles de conduite professionnelle qu'il contient s'appliquent en effet à tous les mandataires agréés, lesquels sont soumis aux mêmes mesures disciplinaires en cas de non-respect de ces règles (article 4 RDM).
4.2 Les règles 100 à 103 du règlement d'exécution sont rattachées aux articles 133 et 134 CBE. La règle 101 CBE contient des dispositions sur le pouvoir des mandataires agissant devant l'Office européen des brevets. Dans ces dispositions, la notion de "mandataire" n'est pas limitée aux mandataires agréés. En effet, il est généralement admis que l'obligation de déposer un pouvoir, prévue à la règle 101 CBE, s'applique également aux avocats habilités à agir en qualité de mandataires (cf. la décision du Président de l'OEB en date du 19 juillet 1991 relative au dépôt des pouvoirs, JO OEB 1991, 489). Toutefois, à l'instar des articles 133 et 134 CBE auxquels elles sont rattachées, les dispositions de la règle 101 CBE n'établissent pas davantage de distinction entre les mandataires exerçant à titre libéral et les autres.
4.3 Ces constatations s'appliquent notamment aussi au paragraphe 9 de la règle 101 CBE.
La règle 101(9) CBE vise à permettre à un mandant de désigner un groupement, au lieu de donner un pouvoir individuel à plusieurs personnes habilitées à exercer en qualité de mandataires. Bien entendu, ce n'est pas le groupement qui est habilité à exercer en qualité de mandataire, mais uniquement ses différents membres. Il n'existe aucun risque d'abus tant que l'on s'assure, conformément à la pratique actuelle de l'Office, que toutes les personnes exerçant au sein du groupement sont habilitées à agir en qualité de mandataires devant l'OEB, et que le mandant n'est pas induit en erreur sur la composition du groupement. Ces conditions peuvent être réunies indépendamment du fait que les membres du groupement exercent à titre libéral ou non. Si elles sont remplies, cette distinction importe aussi peu que lors de l'attribution d'un pouvoir individuel.
La pratique actuelle de l'Office, qui consiste à appliquer la règle 101(9) CBE uniquement aux mandataires agréés "exerçant à titre libéral", ne trouve aucun fondement dans la Convention.
4.4 Cette interprétation de la règle 101(9) CBE est également conforme au but général de la Convention, qui est de permettre l'obtention d'une protection par brevets dans les Etats contractants par une procédure unique de délivrance de brevets (cf. le préambule de la Convention). Ainsi qu'il a déjà été constaté lors de la création de la règle 101(9) CBE, cette disposition devait pouvoir s'appliquer dans différents pays ayant des dispositions juridiques nationales et des traditions différentes. Ainsi, les mandataires se regroupent fréquemment sous une autre forme, par ex. sous la forme d'une société.
C'est pourquoi les expressions "Sozietät" et "partnership" prévues initialement dans la règle 101(9) CBE ont été remplacées par les termes généraux de "Zusammenschluß von Vertretern" et "association of representatives". L'expression "groupement de mandataires" utilisée dans la version française est quant à elle demeurée inchangée (cf. à ce sujet le document CI/GT VI/166f/77 du 20 avril 1977). Dans ce contexte, il n'y a donc aucune raison d'interpréter dans un sens restrictif l'expression "groupement de mandataires".
5. En dépit des conclusions claires auxquelles donne lieu, à ce stade, l'interprétation de la règle 101(9) CBE, il convient à cet égard de prendre également en considération la décision interprétative du Conseil d'administration (cf. point 3.2 supra).
5.1 Cette décision remonte à une proposition de 1978 que le Président de l'Office européen des brevets avait soumise au Conseil d'administration en vue de supprimer la règle 101(9) CBE (cf. document CA/55/78). Cette proposition était principalement motivée par les divergences de vue, au sein du Conseil de l'Institut des mandataires agréés, en ce qui concerne les critères qu'il convenait d'appliquer pour apprécier si un cabinet était un groupement de mandataires et si une entreprise, ou plus précisément le département brevets d'une entreprise, pouvait être considérée comme un groupement de mandataires. Des réserves avaient notamment été émises quant au risque d'exploitation abusive de la règle 101(9) CBE, dans le but de contourner l'obligation de représentation par un mandataire agréé (article 133(2) CBE).
Au sujet de ces réserves, la Chambre constate que même si l'on supprimait la limitation aux mandataires "exerçant à titre libéral", il n'y aurait pas lieu de craindre un tel usage abusif de la règle 101(9) CBE, tant que seraient remplies les conditions citées ci-dessus, auxquelles est subordonné un groupement de mandataires (cf. point 4.3). Un éventuel contournement de l'obligation de représentation visée à l'article 133(2) CBE est exclu, étant donné que chaque membre d'un groupement, et ce qu'il "exerce à titre libéral" ou non, doit avoir son domicile professionnel ou le lieu de son emploi sur le territoire de l'un des Etats contractants pour être habilité à agir en tant que mandataire (cf. règle 102(2)c) CBE).
5.2 Lors de sa quatrième session, qui s'est tenue en décembre 1978, le Conseil d'administration a rejeté à la majorité qualifiée la proposition en question du Président, tendant à supprimer la règle 101(9) CBE. Ainsi, le Conseil d'administration voulait clairement maintenir la règle 101(9) CBE dans son libellé actuel.
Il est toutefois convenu d'adopter la décision interprétative mentionnée, qui avait été élaborée pendant la session par un groupe ad hoc (cf. point 2 supra) et dont l'objectif premier était de dissiper les doutes liés à l'application de la règle 101(9) CBE.
5.3 Les requérants ont fait valoir que cet objectif n'a pas été atteint, du moins dans la perspective d'aujourd'hui. Il existe de plus en plus de formes mixtes entre cabinets classiques de conseils en brevets et départements brevets de l'industrie, tant en ce qui concerne la forme juridique que le type d'activités. Par conséquent, le critère de l'exercice d'une profession libérale semble davantage compliquer la question de leur appartenance à une catégorie définie, plutôt que de dissiper des doutes.
5.4 A la lumière de ces constatations, la décision interprétative du Conseil d'administration perd de l'importance par rapport aux autres éléments d'interprétation. Or, ces derniers jouent clairement en faveur de l'interprétation défendue par les requérants, selon laquelle un groupement de mandataires au sens de la règle 101(9) CBE n'est pas limité aux seuls mandataires agréés exerçant à titre libéral.
6. En conséquence, l'inscription en tant que groupement sous le nom "département brevets X", c/o Société X, adresse, qui est demandée par les requérants, tous mandataires agréés, remplit les conditions de la règle 101(9) CBE. Au cours de la procédure orale, la Chambre s'est assurée par une déclaration en ce sens de l'un des membres du groupement que seuls les trois mandataires agréés cités exerceraient sous le nom de "département brevets X". Il est donc suffisamment certain que les mandataires habilités à exercer en tant que groupement sous ce nom peuvent être facilement identifiés par les mandants.
Dispositif
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision de la division juridique est annulée.
2. Le groupement des mandataires agréés A, B et C, sous le nom de "département brevets X", c/o société X, adresse, est confirmé.
3. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré, afin qu'elle inscrive le groupement au Registre des brevets conformément au point 2.