COMMUNICATIONS DE L'OEB
N° 15/98 (rev.)* - Articles 97 ; 102 ; 113 CBE - Requêtes subsidiaires dans la procédure d'examen et la procédure de recours
Les divisions d'examen doivent rejeter les demandes de brevet européen (art. 97 (1) CBE) et les divisions d'opposition doivent révoquer les brevets (art. 102 (1) CBE) lorsque le texte de la demande ou du brevet dans son intégralité (description, revendications, le cas échéant dessins) ne satisfait pas aux conditions de la CBE. Le dépôt, à titre subsidiaire, d'un autre texte peut dans les cas appropriés clarifier la situation procédurale et raccourcir la procédure, sans que le demandeur ou le titulaire du brevet doive abandonner sa position à ce sujet. Le présent renseignement juridique expose différents aspects juridiques du dépôt, à titre subsidiaire, d'un jeu de revendications et en explique les incidences sur la procédure d'examen et d'opposition.
1. Procédure devant la division d'examen
1.1 En vertu de l'article 113 (2) CBE, l'OEB doit s'en tenir aux requêtes présentées par le demandeur. Toutefois, un brevet européen ne peut être délivré que sur la base d'un texte proposé ou approuvé par le demandeur, dans son intégralité et exempt de toute irrégularité de forme et de fond. Si le texte proposé par le demandeur contient des irrégularités, la demande sera rejetée dans sa totalité, même si ces irrégularités ne portent que sur une partie de la demande (art. 97 (1) CBE)1. Il est exclu que la division d'examen puisse délivrer un brevet européen portant seulement sur certaines revendications et décider en même temps de rejeter le reste de la demande de brevet européen, permettant ainsi au demandeur de former un recours contre cette décision. Etant donné qu'aucune partie adverse ne s'oppose au demandeur et qu'aucun frais de traduction ne doit être acquitté avant qu'une décision de rejet susceptible de recours ne soit rendue, il n'y a aucune raison, dans le cadre de la procédure de délivrance, - contrairement à la procédure d'opposition inter partes - de prononcer une décision intermédiaire pouvant faire l'objet d'un recours indépendant (Art. 106 (3) CBE), et constatant la brevetabilité d'un texte particulier des revendications2 ; au contraire, la demande fait immédiatement l'objet d'une décision de rejet définitive (susceptible de recours).
1.2 Si la division d'examen invite le demandeur, conformément à l'article 96 (2) CBE, à remédier aux irrégularités constatées dans la demande - notamment celles visées aux articles 52 à 57, 83 et 84, et aux règles 27 et 29 CBE-, ce dernier, dans la mesure où il considère que les objections sont justifiées et acceptables, doit soumettre un texte de la demande modifié en conséquence. Le demandeur devra faire en sorte que le contenu des revendications demeure aussi étendu que possible. S'il hésite sur le contenu des nouvelles revendications à rédiger, il peut déposer un jeu de revendications à titre de requête principale, ainsi qu'un ou plusieurs jeux de revendications à titre subsidiaire3.
1.3 Les requêtes subsidiaires doivent être formulées selon les mêmes principes que les requêtes principales. Le demandeur a intérêt à regrouper les revendications les plus étendues dans un premier jeu de revendications déposé à titre de requête principale, et à déposer la version restreinte à titre subsidiaire4.
1.4 La division d'examen examine tout d'abord le jeu de revendications déposé à titre de requête principale, puis celui ou ceux déposé(s) à titre de requête subsidiaire, dans l'ordre indiqué par le demandeur. Si la division d'examen estime qu'un jeu de revendications déposé à titre subsidiaire est brevetable, elle va indiquer (dans une notification établie conformément à la règle 51 (4) CBE ou, éventuellement lors d'une procédure orale) que cette version est brevetable, et préciser les raisons pour lesquelles le jeu de revendications déposé à titre de requête principale et, le cas échéant, ceux déposés à titre subsidiaire, qui précèdent le jeu de revendications considéré comme brevetable, ne peuvent pas être acceptés. Les requêtes qui suivent dans l'ordre de préférence celle considérée comme brevetable, ne sont pas examinées.
1.5 Si le demandeur a déposé un texte admissible à titre de requête subsidiaire, la division d'examen émet la notification prévue à la règle 51 (4) CBE portant sur le jeu de revendications considéré comme admissible ; cette notification précise les raisons pour lesquelles les requêtes qui précèdent dans l'ordre de préférence ne sont pas admissibles, en règle générale par un renvoi à la notification correspondante ou, le cas échéant, aux explications données au cours de la procédure orale. Dans ce cas, les possibilités suivantes s'offrent au demandeur :
a) Il approuve sans réserve le texte notifié conformément à la règle 51 (4) CBE, celui-ci constituant désormais son unique requête. La division d'examen émet ensuite la notification visée à la règle 51 (6) CBE.
b) Il n'approuve pas le texte notifié dans lequel il est envisagé de délivrer le brevet, et préfère s'en tenir à l'une des requêtes qui précèdent dans l'ordre de préférence. La demande est alors rejetée conformément à l'article 97 (1) CBE, étant donné que le texte faisant l'objet de la requête antérieure dans l'ordre de préférence n'est pas admissible et que le demandeur n'approuve pas la délivrance d'un brevet sur la base de la requête subsidiaire considérée comme admissible (règle 51(5) CBE). La décision de rejet précise les motifs pour lesquels la requête principale ou, le cas échéant, les requêtes subsidiaires antérieures dans l'ordre de préférence ne sont pas admissibles.
c) Il dépose des modifications. Si la division d'examen les approuve, ce qui n'est possible que lorsque les modifications proposées ne comportent qu'une seule requête recevable et admissible, elle émet immédiatement la notification visée à la règle 51 (6) CBE. Si la division d'examen n'approuve pas les modifications proposées, elle fait connaître son point de vue au demandeur (règle 51 (5) CBE). Si ce dernier ne modifie pas sa requête de manière à s'engager sur le texte notifié conformément à la règle 51 (4) CBE ou sur un texte modifié dans la mesure autorisée par la règle 86 (3) CBE, et que la division d'examen considère comme brevetable, la demande est rejetée en vertu des mêmes principes que sous b), conformément à l'article 97 (1) CBE.
1.6 Grâce à la notification motivée, établie conformément à la règle 51 (4) CBE, le demandeur peut décider en connaissance de cause de la démarche qu'il va suivre. Toutefois, dans certains cas, il peut avoir intérêt à ce qu'une décision soit prise immédiatement. A sa demande, la division d'examen peut décider immédiatement - dès lors que le principe du fondement des décisions est respecté - que la demande est rejetée, en indiquant les motifs pour lesquels le texte des requêtes qui précèdent dans l'ordre de préférence n'est pas brevetable.
1.7 Si le demandeur forme un recours dans lequel il requiert que le brevet soit délivré dans le texte considéré comme brevetable par la division d'examen (ce qui revient pour lui à faire de ce texte son unique requête), les conditions d'une révision préjudicielle conformément à l'article 109 CBE sont réunies. Dans ce cas, le dossier n'est pas soumis à la chambre de recours ; c'est la division d'examen qui émet en règle générale immédiatement la notification selon la règle 51 (6) CBE. Il n'est pas procédé au remboursement de la taxe de recours visé à la règle 67 CBE.
1.8 Si les conditions d'une révision préjudicielle ne sont pas réunies, le dossier est transmis immédiatement et sans avis sur le fond à la chambre de recours, qui n'est toutefois pas liée par l'appréciation favorable de brevetabilité émise par la division d'examen au sujet d'un texte faisant l'objet d'une requête subsidiaire.
2. Procédure devant la division d'opposition
2.1 Lorsque des motifs d'opposition s'opposent au maintien du brevet européen tel qu'il a été délivré, le brevet est révoqué ou maintenu tel qu'il a été modifié, si la division d'opposition estime que, compte tenu des modifications apportées par le titulaire du brevet, le brevet européen et l'invention qui en fait l'objet satisfont aux conditions de la CBE (art. 102 (3) CBE)5. Pour que le brevet puisse être maintenu sous une forme modifiée, il est nécessaire que le titulaire donne son accord (art. 102 (3) a) ensemble l'art. 113 (2) CBE).
2.2 Au cours de la procédure d'opposition, le titulaire du brevet peut aussi déposer en complément un ou plusieurs autres jeux de revendications à titre de requêtes subsidiaires6, sur lesquelles la division d'opposition pourra s'appuyer pour prendre une décision de maintien en vigueur du brevet sous une forme modifiée.
2.3 En ce qui concerne la formulation des requêtes et l'ordre dans lequel elles sont examinées, on se reportera aux principes énoncés aux points 1.3 et 1.4, qui s'appliquent par analogie. Chaque jeu de revendications doit en outre satisfaire aux conditions de l'article 123 (3) CBE ; il convient également de tenir compte du fait que dans la procédure d'opposition, les modifications doivent être apportées pour pouvoir répondre aux motifs d'opposition visés à l'article 100 CBE (règle 57bis CBE).
2.4 Si la division d'opposition estime que le brevet ne peut être maintenu que sous une forme modifiée correspondant à une requête subsidiaire, elle rend immédiatement7 après que toutes les parties ont pu prendre position (art. 113 (1) CBE) une décision intermédiaire conformément à l'article 106 (3) CBE, dans laquelle il est constaté que compte tenu des modifications apportées par le titulaire du brevet, le brevet européen et l'invention qui en fait l'objet, satisfont aux conditions de la CBE, et dans laquelle sont également indiqués les motifs pour lesquels les textes des requêtes qui précèdent dans l'ordre de préférence ne remplissent pas ces conditions. Un recours indépendant peut être formé contre cette décision8.
2.5 Le titulaire du brevet peut également former un recours contre cette décision intermédiaire au motif que l'inadmissibilité des requêtes précédentes qui a été constatée ne fait pas droit à ses prétentions.
* Version révisée du renseignement juridique no 15/84 (JO OEB 1984, 491).
1 Le demandeur a auparavant la possibilité de remédier à ces irrégularités (Art. 96 (2) CBE).
2 On parlera également par la suite de texte des revendications et de jeux de revendications ; ces termes se rapportent également par analogie au texte complet de la demande (revendications, description, dessins).
3 Lorsque plusieurs jeux de revendications sont déposés à titre subsidiaire, le demandeur doit indiquer l'ordre dans lequel il a choisi de les présenter (requête subsidiaire I, II, etc.). Il n'est toutefois ni admissible, ni opportun de déposer un nombre excessif de requêtes subsidiaires (décision T 907/91, non publiée).
4 Même lorsque la requête subsidiaire contient des revendications remaniées, il n'est pas nécessaire de reproduire dans cette requête le texte complet de revendications identiques ; il suffit, au passage concerné, de se référer à ces revendications identiques. Si l'on estime que les revendications 1 et 2 de la requête principale risquent de ne pas être considérées comme brevetables par la division d'examen, on pourra par exemple présenter une requête subsidiaire formulée de telle sorte que les revendications 3 à 10 selon la requête principale deviennent dans cette requête subsidiaire les revendications 1 à 8.
5 ainsi qu'aux conditions de forme prescrites à l'art. 102 (3) b) et (5) (taxe d'impression et traduction des revendications).
6 Lorsque plusieurs jeux de revendications sont déposés à titre subsidiaire, le demandeur doit indiquer l'ordre dans lequel il a choisi de les présenter (requête subsidiaire I, II, etc.). Il n'est toutefois ni admissible, ni opportun de déposer un nombre excessif de requêtes subsidiaires (décision T 907/91, non publiée).
7 En règle générale, il n'est pas émis de notification conformément à la règle 58 (4) CBE, étant donné qu'en pareil cas, une telle notification n'est ni nécessaire, ni opportune en vertu de la décision G 1/88 (JO OEB 1989, 189) (Directives D-VI, 7.2.1).
8 Directives D-VI, 7.2.2 - pratique générale approuvée par la jurisprudence (T 89/90, JO OEB 1992, 456 et T 390/86, JO OEB 1989, 30) : ce n'est que lorsque la décision intermédiaire est passée en force de chose jugée (le cas échéant après son réexamen lors de la procédure de recours) que le titulaire du brevet est invité conformément à la règle 58 (5) CBE à produire la traduction des revendications et à acquitter la taxe d'impression.